Un peu plus d'un an après la mort d'un cycliste sur la piste multifonctionnelle du pont Jacques-Cartier, une demi-douzaine de « radars éducatifs » seront installés le long du parcours pour inciter les cyclistes à maintenir leur vitesse sous les 20 km/h.

Selon nos informations, les appareils auront une affichette montrant la vitesse à laquelle roulent les cyclistes qui empruntent la piste. L'écran clignotera lorsque le vélo dépassera la vitesse recommandée de 20 km/h.

« Les plans sont finalisés et l'installation des radars doit débuter d'ici la fin de l'automne », a indiqué à La Presse la porte-parole de la Société des ponts Jacques-Cartier et Champlain (SPJCC), Julie Paquet. « C'est une piste qui a des dénivelés importants, avec des chicanes et des courbes. Ces radars visent à aider les cyclistes à moduler leur vitesse en fonction des dangers », particulièrement lorsqu'ils sont dans une pente descendante, précise Mme Paquet.

Un premier radar avait été installé temporairement sur le pont au début juillet, mais l'affichage n'était pas actif. La SPJCC avait alors affirmé sur Twitter qu'il s'agissait « de radars pour fins statistiques seulement ». « Nous voulions entre autres savoir à quelle vitesse les cyclistes roulent », précise Mme Paquet.

VÉLO QUÉBEC APPROUVE L'INITIATIVE

L'installation de tels radars centrés spécifiquement sur la circulation des vélos serait une première au Québec. L'organisme Vélo Québec voit plutôt d'un bon oeil l'initiative.

« C'est un peu utopique de croire que les cyclistes vont se contenter de rouler à 20 km/h. Mais nous avons hâte de voir si ça donnera des résultats », dit Suzanne Lareau, directrice générale de Vélo Québec.

L'information concernant la mise en place imminente de ce dispositif se trouve dans un rapport du coroner diffusé jeudi, concernant la mort du cycliste Christian Ragueneau, le 24 août 2015, au petit matin.

M. Ragueneau, qui roulait sans casque et sans éclairage sur la piste multifonctionnelle en direction de Montréal vers 3 h 40, était entré en collision avec un autre cycliste qui roulait vers la Rive-Sud en grimpant la pente. La vitesse à laquelle Christian Ragueneau roulait n'est pas spécifiée, mais « sous la force de l'impact, [il] est projeté à une distance d'environ 25 pieds. Il chute sur le dos et sa tête heurte le muret de béton de protection », précise le rapport, signé par la coroner Julie A. Blondin. À l'arrivée des ambulanciers, il est en arrêt cardiaque. Un médecin dépêché sur place constate immédiatement son décès, provoqué par un « traumatisme crânien sévère contondant ».

Le rapport note que l'état de la piste cyclable ne semble pas poser problème. « Nous avons vérifié à la suite de l'accident si l'éclairage pouvait être déficient. Notre conclusion est que tout est adéquat et aux normes », affirme Mme Paquet.

ABSENCE DE PHARES SUR LES VÉLOS

La coroner Blondin souligne par ailleurs que M. Ragueneau utilisait la piste deux fois par jour depuis 2003. Au moment de l'accident, lui et l'autre cycliste « circulent au centre de la piste et semblent être absorbés. Ils ne regardent pas devant eux, écrit-elle, de sorte qu'aucun des deux cyclistes ne tente d'éviter l'autre ».

« Aucun cycliste ne porte de casque de sécurité et ne dispose d'éclairage nocturne suffisant », note la coroner, qui rappelle que les cyclistes qui se déplacent la nuit doivent obligatoirement munir leur vélo d'un phare blanc à l'avant et d'un phare rouge à l'arrière, en plus des réflecteurs usuels. 

« Les phares, c'est un sacré problème. Cela fait 30 ans qu'ils sont obligatoires, et 75 % des cyclistes qui roulent la nuit n'en sont toujours pas équipés. C'est inadmissible », estime Suzanne Lareau.

« Pourtant, ils coûtent à peine 15 ou 20 $ », précise Mme Lareau. L'organisme croit que les campagnes de sensibilisation aident, mais qu'il faudrait peut-être aussi que les policiers interviennent davantage pour appliquer le règlement. « Le problème, c'est qu'ils ne sont pas obligatoires pendant le jour, et que les policiers ne donnent à peu près pas de contraventions aux cyclistes le soir », note Mme Lareau.

Dans son rapport, la coroner note également que le port volontaire du casque devrait être encouragé, mais ne suggère pas de le rendre obligatoire. Gabrielle Anctil, coorganisatrice des « Vélos fantômes », croit d'ailleurs qu'obliger les cyclistes à porter un casque aurait un effet pervers. « C'est démontré que le port obligatoire du casque diminue la pratique du vélo. Et moins il y a de cyclistes sur les routes, moins celles-ci [les pratiques] ont tendance à être sécuritaires », résume-t-elle.