La saison des chantiers risque d'être perturbée à Montréal alors que les ingénieurs de la Ville se rapprochent de plus en plus d'un débrayage. Leur syndicat vient d'emprunter 1 million afin de garnir son fonds de grève en vue d'un long affrontement qui pourrait être déclenché dès la semaine prochaine.

«On s'attend à une guerre très dure. On s'attend à une longue grève», dit sans détour André Émond, président du Syndicat professionnel des scientifiques à pratique exclusive de Montréal (SPSPEM).

Montréal mène présentement un blitz de négociations avec le syndicat qui représente 440 professionnels - ingénieurs, arpenteurs, géomètres, chimistes et médecins vétérinaires. L'organisation, dont la convention collective est échue depuis plus de cinq ans, se dit toutefois grandement insatisfaite de la progression des discussions et s'apprête à envoyer un avis de grève illimitée.

Rappelons que les membres du syndicat avaient voté à 92% au début du mois d'avril pour donner un tel mandat à ses dirigeants en cas d'impasse prolongée à la table de négociations. Et c'est exactement ce qui se produit présentement, déplore M. Émond.

Le syndicat indique que la Ville a présenté plusieurs demandes et que celles-ci représenteraient une réduction de 9 % de leur rémunération. «Déjà qu'on est en deçà du marché, ça viendrait nous placer dans le fond de la cave. Nos membres ne l'acceptent tout simplement pas», dit André Émond. Celui-ci ajoute que le mécontentement est d'autant plus élevé chez ses membres que ceux-ci n'ont pas obtenu d'augmentation salariale depuis six ans.

À défaut d'avancées à la table de négociations, le syndicat prévient qu'il compte envoyer à «très, très court terme» un avis de grève. Celui-ci pourrait être déposé dès aujourd'hui. Le débrayage pourrait ainsi être déclenché la semaine prochaine. «On est sur un pied de guerre, tout est prêt», confirme André Émond.

Fonds de grève garni

Assurant qu'il ne s'agit pas de paroles en l'air, le syndicat dit s'être constitué un imposant fonds de grève. Depuis deux ans, les membres ont augmenté leurs cotisations et divers emprunts ont été faits auprès d'institutions bancaires. De plus, le 29 avril dernier, le syndicat a conclu une entente avec l'Association du personnel administratif professionnel de l'Université Laval (APAPUL) afin de lui emprunter 1 million. Ce syndicat de Québec a signé une convention collective en décembre dernier et n'a donc pas utilisé le fonds de grève qu'il s'était constitué en cas de débrayage. Il servira plutôt à épauler les ingénieurs de Montréal.

Cette menace de débrayage plane alors que Montréal prévoit une année record de travaux sur ses infrastructures vieillissantes, plus de 400 chantiers étant planifiés. Reste à voir quel serait l'impact d'une grève, la Ville ayant conclut plusieurs ententes avec des firmes de génie pour surveiller une importante partie des travaux en raison du manque de personnel. Le syndicat prévient qu'il ne tolérera pas l'utilisation de briseurs de grève pour remplacer ses membres lors du débrayage.