La Ville de Montréal a rendu publiques, hier soir, les premières images de l'intercepteur sud-est depuis l'assèchement de la conduite de 30 kilomètres, il y a deux jours.

Le maire de Montréal, Denis Coderre, y est d'ailleurs descendu hier midi durant une trentaine de minutes afin de constater de visu la condition des structures dont l'état vétuste justifie, selon son administration, le déversement de 8 milliards de litres d'eaux usées dans le fleuve Saint-Laurent cette semaine. L'opposition a vivement critiqué cette mise en scène.

Le maire est descendu 35 mètres sous terre dans une nacelle devant les caméras de télévision. Il a quitté le site situé à l'angle des rues Mill et Riverside en levant le pouce vers le haut, sans accorder d'entrevues.

«Je vous avoue que j'ai trouvé ça hallucinant, il ne faut pas être claustrophobe même si c'est un tunnel de cinq mètres de diamètre. On est habitués à certaines odeurs politiques, mais celles-là étaient encore plus fortes», a-t-il déclaré quelques heures plus tard.

Depuis hier après-midi, des ouvriers s'affairent à détacher des «cintres», des structures de bois et d'acier qui ont été installées temporairement en 1997 et qui sont dans un état de détérioration avancée. Selon la Ville de Montréal, ils menacent de se détacher dans l'intercepteur et d'endommager les convoyeurs et les pompes de la station d'épuration, ou encore de provoquer la formation d'embâcles dans le réseau. Hier après-midi, 14 des 36 cintres avaient été retirés. Environ 25 ouvriers travaillent dans l'égout surdimensionné pour inspecter, réparer et nettoyer les sédiments et débris accumulés.

L'opposition critique le «photo op»

L'opposition officielle à l'hôtel de ville a critiqué le fait que le maire Coderre s'adonne à une séance de prise d'images.

«Les Montréalais voulaient voir les chiffres, voulaient voir les études et en échange, ce que Coderre leur donne, c'est plus de photos de lui! On ne gère plus une crise, on gère l'image du maire», a déclaré Guillaume Lavoie, conseiller municipal pour Projet Montréal.

«N'importe qui qui a travaillé dans une usine ou sur un chantier de construction sait que lorsque le patron débarque, tout arrête. Lorsque le maire, à cause de son désir de se faire voir, vient retarder les travaux, ça, c'est préoccupant. Le vrai leadership, ce n'est pas de se faire prendre en photos, c'est d'aller dans son bureau et de s'assurer que ça n'arrive plus jamais comme ça. Qu'on mette un fonds en place pour la décontamination, qu'on mette en place un vrai plan de communication pour réparer notre réputation à l'international. Ça, ce sont les actions de quelqu'un de sérieux.»

Bientôt les résultats d'analyse 

La Ville de Montréal a indiqué que les premiers résultats des tests microbiologiques de l'eau allaient être connus au cours des trois prochains jours.

Le maire Coderre a cependant révélé hier les résultats de trois tests menés sur des truites. «Dans les 30 truites, on en a perdu juste une», a expliqué le maire Coderre. «Le taux de toxicité aigu, c'est si on perdait jusqu'à 50% des poissons. Ça vous démontre que la toxicité n'a pas augmenté», a-t-il ajouté.

Le panache d'effluents observé mercredi dans le Vieux-Port de Montréal est d'ailleurs toujours présent. «Les activités des surveillances visuelles ont permis de constater le maintien du faible panache dans le secteur du Vieux-Port, ainsi qu'au voisinage de certains autres points de rejet», pouvait-on lire dans un communiqué de la Ville de Montréal hier soir.

En temps normal, l'intercepteur sud-est dirige le tiers des eaux usées de l'île vers la station d'épuration située à la pointe de l'île de Montréal. Pendant l'assèchement, les eaux usées se vident via 24 conduites comprises entre LaSalle et Rivière-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles. Elles sont en général situées à une distance de 30 à 50 mètres des berges.

Tout ce que les citoyens vivant dans le sud de l'île jettent dans leurs éviers, égouts, toilettes jusqu'à mardi ou mercredi prochain se retrouvera directement dans le fleuve.