Les arguments du maire de Montréal n'ont pas su convaincre la ministre fédérale de l'Environnement Leona Aglukkaq : elle a officialisé vendredi soir l'arrêté ministériel pour bloquer jusqu'au 3 novembre le déversement de 8 milliards de litres d'eaux usées dans le fleuve Saint-Laurent censé débuter dimanche. Une décision «irresponsable» s'insurge Denis Coderre qui appelle les Montréalais à ne pas voter pour le Parti conservateur lundi.

«Si on veut s'assurer qu'on puisse protéger le fleuve, si on veut s'assurer d'avoir des politiques d'environnement adéquates, il faut que les gens, le 19 octobre, aillent voter, puis il faut changer ce gouvernement. Votez stratégique, faites ce que vous avez à faire, mais ce gouvernement-là ne protège pas les intérêts des Montréalais», a lancé le maire Coderre, excédé, dans une mêlée de presse en marge de la Nuit des sans-abris, vendredi soir.

Accusant le gouvernement Harper de faire de la «politique sur le dos des Montréalais», Denis Coderre est allé plus loin en anglais en laissant entendre que le puissant cabinet du premier ministre aurait joué un rôle dans la décision de bloquer le déversement. «Madame Aglukkaq en est probablement à ses derniers jours comme ministre. Elle ne contrôle rien. C'est probablement le cabinet du premier ministre [PMO].»

La Ville de Montréal devra ainsi attendre l'analyse des résultats de l'«examen scientifique» lancée par Environnement Canada avant de procéder à tout déversement. Denis Coderre a d'ailleurs promis de respecter l'arrêté ministériel. «Il n'est pas question de poser un acte criminel», a-t-il soutenu.

La vidange de l'eau devait avoir lieu du 18 au 25 octobre dans le cadre de travaux pour déplacer une chute à neige et pour retirer des systèmes de soutènement vétustes qui menacent de se détacher dans l'intercepteur Sud-Est. Cette immense conduite de 30 kilomètres sert à diriger les eaux usées vers la station d'épuration de Montréal. Jeudi, la ministre avait annoncé qu'elle décrétait un arrêté ministériel pour stopper le rejet en attendant qu'un «expert indépendant» se penche sur cette affaire.

Dans son droit de réplique soumis vendredi matin, le maire Coderre énumère les conséquences qui pourraient survenir si les travaux ne sont pas réalisés d'ici à la fin novembre et devaient être reportés à l'an prochain. Il y explique notamment que des débris de tailles variables pourraient causer des dommages aux installations de traitement des eaux. Il y souligne par ailleurs qu'il ne sera pas possible, au cours de l'hiver prochain, de traiter des dizaines de milliers de tonnes de neige usée dans le système d'assainissement de la Ville de Montréal.

«Le recours à un arrêté ministériel en vertu de la Loi sur les pêches est inapproprié et abusif dans les circonstances», a écrit le maire Coderre.