C'est avec une grue, un conteneur et de l'assistance policière que des employés municipaux ont procédé samedi matin au démantèlement des aménagements d'une ruelle du Plateau-Mont-Royal, que des voisins avaient verdie et animée au cours des 10 dernières années.

Sans fournir d'explications, les employés ont emporté le bain sur pattes, les bacs à fleurs, les valises remplies de fines herbes et le vieux piano qui agrémentaient la ruelle, située entre les avenues Laval et de l'Hôtel-de-Ville, à la hauteur de la rue Napoléon.

«Des voisins ont sauvé quelques chaises», a fait remarquer la résidante du quartier Marylène Fortier, en montrant une pile de chaises Adirondack mauves empilées dans la cour arrière de son voisin Simon, qui a commencé à émailler la ruelle il y a 10 ans.

Le 24 août, les résidants des maisons donnant sur la ruelle des Brûleurs - baptisée ainsi par ceux qui la fréquentaient - ont reçu un avis de la Ville de Montréal. «Nous désirons vous aviser de remédier à la problématique de la ruelle publique entre Hôtel-de-Ville et Avenue Laval au sud de Napoléon», lisait-on dans la lettre, qui référait au règlement de l'arrondissement du Plateau-Mont-Royal qui interdit de «jeter, déposer ou laisser des biens, des effets ou des marchandises sur le sol du domaine public». Au bas de la missive, une référence au site web de la Ville pour obtenir davantage d'information et la signature indécodable d'un employé nommé «inspecteur du domaine public».

«On n'évoquait pas de délai, il n'y avait pas de nom, pas de numéro de téléphone et la lettre était assez équivoque», a dénoncé Marylène Fortier.

Comme les résidants, le conseiller de ville du district Jeanne-Mance, où se trouve la ruelle, a appris la nouvelle quand la grue est arrivée. «C'est bien triste. Ce n'est pas ce que j'aurais aimé voir», a déclaré Alex Norris hier. Bien que la création de la ruelle des Brûleurs constitue un geste que son parti, Projet Montréal, «accueille habituellement favorablement», le démantèlement de celle-ci faisait partie des risques du projet.

«Quand vous posez une action directe comme celle-là, vous vous exposez à un risque, et c'est celui d'être vulnérable à des plaintes et à un démantèlement», a-t-il expliqué. Alex Norris a donc incité les résidants du secteur à envoyer une demande formelle afin de créer une ruelle verte.

«C'est un endroit idéal, parce qu'il n'y a pas de portes de garage ni de stationnement», a observé le conseiller. Comme les voisins, il croit que ce sont des plaintes qui ont sonné la fin de la ruelle.

«Nous n'avons pas le contrôle sur les inspecteurs ou sur la police», a déclaré Alex Norris, en suggérant quand même aux citoyens d'avertir leurs conseillers respectifs lorsqu'une lettre ressemblant à celle envoyée à Marylène Fortier et ses voisins atterrit dans la boîte postale. «Quand tu ne sais pas à qui parler, appelle ton conseiller», a rappelé l'élu, en disant espérer que ce «triste épisode» devienne le point de départ d'un nouveau projet - officiel - de ruelle verte.