Inquiète du comportement inapproprié de certains élèves à l'heure du dîner, la direction de l'école secondaire Sophie-Barat a envoyé lundi aux parents une lettre pour leur faire part de la situation et les inviter à intervenir auprès de leur ado. Un cas rarissime, a indiqué la Commission scolaire de Montréal. Un supermarché voisin victime de débordements a même interdit jusqu'à nouvel ordre l'accès à tous les élèves de l'école.

Plusieurs méfaits se sont récemment produits sur l'heure du midi autour de l'école du quartier Ahuntsic, qui accueille quelque 1500 élèves de la première à la cinquième secondaire. «Parmi les jeunes qui sortent sur l'heure du midi, quelques-uns commettent des actes incompatibles avec la mission éducative de l'école (vols, vandalisme, attroupements, menaces)», peut-on lire dans la lettre aux parents. Des plaintes ont été adressées par des commerçants et des citoyens.

«Finalement, certains de nos élèves ont commis des gestes imprudents aux abords de la rivière des Prairies», souligne également le message, signé par le directeur de l'école et une agente sociocommunautaire du Service de police de la Ville de Montréal.

Des élèves rencontrés mercredi autour de l'école nous ont expliqué que des jeunes s'amusaient notamment à grimper sur la structure du pont Viau, près de l'école.

Les grands moyens

Le supermarché IGA, massivement pris d'assaut par des dizaines d'élèves chaque midi, a pour sa part décidé de prendre les grands moyens en interdisant l'accès à tous les élèves pour une période indéterminée.

Comme l'année scolaire tire à sa fin, la mesure risque d'être en vigueur jusqu'à l'automne.

Rencontré sur place, le propriétaire a confié ne pas se réjouir de la tournure des événements. «Il peut y avoir entre 80 et 120 jeunes ici sur l'heure du dîner. Il y a beaucoup de flânage. Beaucoup de clients disent se sentir intimidés», explique le propriétaire Danny Parent.

Si l'achalandage des élèves remonte à l'ouverture du magasin en 2013, la situation a récemment dégénéré après une échauffourée entre des élèves et des employés. «Il y a eu des menaces contre mes employés. Ce n'est pas mon bon vouloir d'interdire l'accès aux jeunes, mais je n'avais pas le choix. Du moins, il fallait calmer le jeu», résume M. Parent.

Selon plusieurs élèves rencontrés, l'incident du IGA impliquait quelques élèves seulement, qui s'en sont pris à des employés après un échange d'insultes. Une bousculade aurait alors éclaté, ce qui a forcé l'intervention des policiers. Quelques élèves ont reçu des contraventions, d'autres ont été suspendus. La police a aussi rapporté des vols à l'étalage.

Les élèves estiment néanmoins que l'interdiction d'aller au supermarché pour l'ensemble des étudiants est sévère. «Nous, ça ne nous dérange pas, mais c'est eux qui vont perdre de l'argent!», lance Mohammed, qui va maintenant dîner à la pizzeria située à côté du supermarché.

Le gérant du comptoir, Dédé, dit ne pas avoir de problèmes avec les jeunes de Sophie-Barat, qui occupent chaque midi les quelques tables de son établissement. «Dès fois, la chicane pogne, ils sont quatre ou cinq pour acheter une seule pointe ou ils apportent de la nourriture de la maison ou du IGA, mais ça se passe bien dans l'ensemble», affirme le gérant.

Même constat au dépanneur voisin, où la gérante Gigi connaît très bien les élèves de l'école pour avoir travaillé 14 ans à la pizzeria voisine. «Les jeunes m'appellent maman. Je connais bien un des jeunes impliqués dans l'incident au IGA. Il est venu pleurer ici après l'intervention des policiers, désemparé. Il m'a dit n'avoir rien fait», raconte Gigi.

Les policiers ont fait le tour des commerces voisins pour avoir un portrait de la situation. Tout juste avant notre passage, ils sont justement venus voir Victor, le propriétaire de cet autre dépanneur. «J'ai deux agents de sécurité le midi et après l'école, l'un à la porte et l'autre à l'intérieur. Je fais aussi entrer seulement ceux qui achètent», explique le propriétaire, qui ajoute qu'il prend les choses avec un grain de sel. «C'est seulement de la petite délinquance», souligne-t-il.