Une portion de la rue De Bleury, dans le Vieux-Montréal, sera complètement fermée à toute circulation durant plusieurs mois, au cours de l'été, en plein coeur du quartier des affaires, afin de remplacer un pont d'étagement surplombant l'autoroute Ville-Marie (A720).

Ce court tronçon de rue entre l'avenue Viger et la rue Saint-Antoine Ouest n'est en fait pas vraiment une rue. C'est un pont d'étagement, construit au-dessus de l'autoroute Ville-Marie (A720) à l'époque de son aménagement, pour relier entre elles ces deux artères du Vieux-Montréal.

La structure n'est pas imposante: elle fait 28 mètres de longueur sur 18,6 mètres de largeur. Selon le ministère des Transports du Québec (MTQ), seulement 8500 véhicules par jour, en moyenne, utilisent cette section de la rue De Bleury.

Mais sa démolition prévue pour l'été prochain et la construction d'un nouveau pont de remplacement vont produire un impact important dans le secteur en raison de sa localisation, directement entre le Palais des congrès et la place Jean-Paul Riopelle, qui longe l'immeuble de la Caisse de dépôt et placement du Québec, à un jet de pierre de l'hôtel InterContinental et du Centre de commerce mondial.

Cette position centrale, dans un secteur d'affaires, en fait un endroit très fréquenté, le midi notamment, par les employés de tours de bureaux voisines, et constamment arpenté par des milliers de piétons et de cyclistes de passage.

Entraves de longue durée

La démolition du viaduc du MTQ, construit en 1972, et la construction du nouveau pont, qui devront être réalisées à l'intérieur d'un périmètre assez restreint, risquent aussi de rendre tout le secteur infréquentable durant des mois.

Selon un porte-parole du Ministère, Mario Saint-Pierre, une voie de circulation de l'avenue Viger, en direction ouest, sera d'ailleurs retranchée pendant toute la durée des travaux entre la rue Jeanne-Mance et la place Jean-Paul Riopelle.

Sur l'autoroute Ville-Marie, qui passe sous le pont d'étagement, le MTQ fermera complètement deux voies de circulation sur cinq, en direction ouest, pour toute la durée des travaux, de la rue Panet jusqu'à la sortie 5 de l'autoroute, qui mène vers le pont Champlain. De plus, des fermetures occasionnelles complètes de l'autoroute, pendant la nuit ou les fins de semaine, seront aussi nécessaires.

Il n'est pas évident de distinguer la présence de ce pont d'étagement à hauteur de la rue. Au moment de sa construction, en 1972, il était vraisemblablement plus «visible», mais au fil des décennies, plusieurs grands bâtiments ont peu à peu couvert la tranchée de l'autoroute, dont le Palais des congrès et le siège social de la Caisse de dépôt, au point de le fondre dans le décor.

Fissures et corrosion

Le pont est en mauvais état. Un rapport d'inspection, daté de mai 2014, relève que le béton, sous le tablier, montre des «fissures de plus de 0,3 millimètre», de grandes surfaces de béton délaminé, des «barres d'armature apparentes, dégagées et corrodées» sur 5% de leurs surfaces.

Les culées du pont font partie intégrante du mur de soutien de la tranchée au fond de laquelle est construite l'autoroute Ville-Marie. Le rapport fait état de dommages très étendus sur les surfaces de béton, d'infiltrations d'eau, de «défauts de matériaux pouvant réduire de façon appréciable sa capacité à supporter les charges». L'armature d'acier est bien dégagée, sous le béton brisé. L'ouvrage est sécuritaire, mais il agonise.

En février dernier, le MTQ a attribué un contrat de 5,8 millions pour la démolition du pont actuel et la construction du nouveau pont, au terme d'un appel d'offres public, à la firme Grands Travaux Soter. La date précise du début des travaux n'est pas encore connue. Le chantier se mettra vraisemblablement en place au printemps et durera un minimum de trois mois.

En 2007, cette structure avait été fermée d'urgence durant quelques jours après une inspection. C'était dans le climat de prudence extrême, après l'effondrement du viaduc de la Concorde survenu à Laval un an plus tôt. Une commission publique chargée d'enquêter sur cette tragédie avait émis la directive au MTQ de porter une attention particulière à tous les ponts constitués d'une dalle épaisse de béton, sans armature contre le cisaillement. Il y en avait 135 dans la province. Le «viaduc De Bleury» est l'une des dernières de ces 135 structures à être encore en service aujourd'hui.