La majorité des casernes de Montréal devront faire l'objet de travaux afin de capter les fumées de diesel émises par les camions de pompiers, leurs émanations étant cancérogènes. La métropole évalue à un peu plus de 16 millions la facture de ces réfections imposées par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST).

L'Association des pompiers a porté plainte il y a quelques années en raison «d'émanations incommodantes et nocives» dans les casernes. Ces fumées proviennent des camions que l'on doit faire démarrer de temps à autre pour leur entretien.

La Ville avait proposé d'améliorer la ventilation des bâtiments, mais après analyse, la CSST a demandé au Service incendie de Montréal (SIM) d'installer des systèmes de captation pour «réduire les risques d'exposition des pompiers à la fumée de diesel».

Les travaux ainsi prévus dans les casernes consistent à installer des tuyaux flexibles qui peuvent être branchés sur les pots d'échappement des camions de pompiers afin d'extraire la fumée qui s'en échappe. Le SIM prévoit réaliser les travaux en priorité dans 17 casernes qui ne disposent d'aucun système de captation. Les 39 autres casernes qui disposent déjà d'un tel système devront quant à elles faire l'objet d'une mise à jour, leur dispositif n'étant pas assez performant.

Il en coûtera 16,3 millions pour réaliser ces travaux d'ici 5 ans dans 56 de ses 67 casernes de la métropole, précise le plan des investissements de la Ville.

Pour accélérer le travail, le SIM prévoit diviser les travaux à réaliser dans les casernes en quatre lots pour que quatre équipes travaillent en parallèle. On espère ainsi réaliser tous les travaux de 2015 à 2018.

«Ça m'apparaît un projet intéressant. Il faut agir pour essayer de prévenir», a commenté Brigitte Roberge, hygiéniste du travail à l'Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST). Cette spécialiste souligne que certains camions sont dotés de dispositifs pour capter les polluants, mais ces catalyseurs fonctionnent efficacement après quelques minutes seulement.

Les gaz d'échappement des moteurs diesels sont classés depuis juin 2012 par l'Organisation mondiale de la santé comme étant «cancérogènes pour l'homme», le niveau de dangerosité le plus élevé. Cette décision a suivi une importante étude américaine publiée en mars 2012 sur les expositions de mineurs de fond «qui a mis en évidence un risque accru de décès par cancer du poumon chez les travailleurs exposés».

«Aucun cas d'intoxication chez les pompiers ou de congé de maladie n'a été répertorié au SIM en lien avec l'exposition à ces fumées», a assuré une porte-parole du service, Élise Breault.

Précédents au Québec

La CSST a déjà imposé à une entreprise d'indemniser un travailleur après avoir établi un lien entre son cancer du poumon et les fumées de diesel auxquelles il avait été exposé pendant des années. La société minière IAMGOLD avait contesté, mais la Cour supérieure avait maintenu la décision en 2013. Le jugement était toutefois intervenu après la mort du travailleur.

Quant aux pompiers, la CSST indique en avoir indemnisé trois entre 2009 et 2013 pour des cancers liés à leur profession. La Commission a reçu en 2003 sa toute première demande d'indemnisation de la part d'un pompier atteint d'un cancer. On avait alors ordonné une révision de la littérature scientifique sur les risques liés à cette profession. Le chercheur écossais Douglas McGregor avait révisé une quinzaine d'études et reconnu «officiellement l'existence de liens probants entre la profession de pompier et des types de cancers».

Premières casernes visées par le projet

• Caserne 17 à Montréal-Nord

• Caserne 18 à Montréal-Nord

• Caserne 21 à Saint-Léonard

• Caserne 22 à Saint-Léonard

• Caserne 23 dans le Sud-Ouest

• Caserne 28 dans Anjou

• Caserne 30 dans le Plateau-Mont-Royal

• Caserne 43 dans Ahuntsic-Cartierville

• Caserne 45 dans Mercier-Hochelaga-Maisonneuve

• Caserne 57 dans Pierrefonds-Roxboro

• Caserne 64 dans Lachine

• Caserne 78 dans Côte-Saint-Luc