Les cols blancs et les cols bleus ne sont pas les seuls à envisager la grève pour s'opposer au projet de loi 3 sur les régimes de retraite. Le Syndicat des professionnels municipaux de Montréal n'écarte aucun moyen de pression si le gouvernement va de l'avant avec sa proposition.

Questionnée sur la possibilité d'un débrayage de ses 2500 membres, la présidente Gisèle Jolin répond clairement: «Si on n'a pas le choix, c'est ce qu'on va recommander.» Sans révision du projet de loi, la chef syndicale compte convoquer ses membres en assemblée générale pour adopter des moyens de pression.

Actuellement, Mme Jolin dit toutefois vouloir poursuivre le débat et espère toujours voir le gouvernement faire marche arrière. «Pour le moment, les élus se disent ouverts à une discussion, alors on essaie de faire entendre nos arguments.»

Le syndicat digère toutefois mal de ne pas avoir été invité à exprimer son point de vue en commission parlementaire. «On considère que, les professionnels, on est très bien placés pour comprendre un projet aussi complexe», a-t-elle déploré.

Problème centenaire

Dans son mémoire tout de même déposé en commission, le Syndicat des professionnels avance que le déficit des régimes de retraite est plus que centenaire à Montréal. Gisèle Jolin affirme que le problème avait été identifié dès l'adoption, en 1965, de la première loi sur les régimes de retraite municipaux. On avait alors constaté une «sous-cotisation généralisée et continue depuis 1912».

Le gouvernement avait donné 25 ans à Montréal pour combler le déficit, mais des congés de cotisation ont été accordés à plusieurs occasions à la métropole, notamment lors d'Expo 67, si bien que le déficit n'est toujours pas comblé un demi-siècle plus tard.

«Il y a eu énormément de retard et l'argent n'a pas été mis au moment opportun dans les régimes. Le fait que l'argent n'ait pas été dans la caisse n'a pas permis de faire des placements quand les marchés montaient», souligne la chef syndical.

Le syndicat en vient à rejeter l'un des arguments centraux du gouvernement pour défendre son projet de loi: l'équité intergénérationnelle. Mme Jolin affirme qu'il n'est pas plus équitable de faire payer aux employés actuels les déficits des retraités de 1966.

Les professionnels dénoncent aussi ce qu'ils qualifient «d'injustice flagrante» touchant les employés qui proviennent des villes fusionnées. 

Plusieurs d'entre eux ont choisi de payer pour bénéficier des prestations des régimes de Montréal.

Or, la fin de l'indexation proposée fera que «le coût du rachat aura été supérieur à la valeur des prestations acquises», déplore Mme Jolin.

Selon les données de Montréal, ses 2500 professionnels gagnent en moyenne 79 000$ par année. Avec le partage à parts égales du coût des régimes de retraite, chaque professionnel devra débourser en moyenne 1940$ de plus par année (approximativement 1200$ après impôt).