Le coût d'un système léger sur rail (SLR) sur le nouveau pont Champlain est «complètement» sous-estimé, soutient le ministre des Transports, Robert Poëti. La facture s'élèverait à plus de 2 milliards.

Un système rapide par bus serait quant à lui moins cher que le 1,2 milliard avancé dans l'étude de la firme AECOM commandée par l'Agence métropolitaine des transports (AMT) et révélée par La Presse hier. Le coût se chiffrerait plutôt à 890 millions, indique-t-on à Québec.

Cinglant, Robert Poëti prévient l'Agence métropolitaine de transport (AMT), qui privilégie le SLR, que la décision définitive est la responsabilité du gouvernement. Il rencontre aujourd'hui le PDG de l'AMT, l'ex-député péquiste Nicolas Girard, pour discuter de ce dossier, entre autres.

«L'AMT peut proposer ce qu'elle veut, c'est moi qui décide, c'est nous qui allons décider pour les citoyens du Québec. Si jamais il ne le savait pas, demain [aujourd'hui], je vais le lui expliquer!» a-t-il lancé lors d'un entretien avec La Presse, hier. Interrogé sur l'avenir de M. Girard à la tête de l'AMT, il a utilisé une formule laconique: «Il va être là demain, alors je vais le rencontrer.»

Robert Poëti remet en question la décision du gouvernement Marois, annoncée le 19 avril 2013 en compagnie de M. Girard, d'opter pour un SLR sur le nouveau pont Champlain. Rappelons que le gouvernement Charest avait lui-même montré un intérêt pour ce système de transport collectif. «On étudie attentivement le SLR», pour le nouveau point Champlain, disait le ministre des Transports Sam Hamad en 2011. Il mettait alors sur pied le «Bureau des partenaires sur les mesures préparatoires au remplacement du pont Champlain» avec pour mandat, entre autres, de mettre à jour les études sur un SLR. Lors d'un point de presse avec M. Hamad le 11 avril 2011, sa collègue de La Pinière, Fatima Houda-Pepin - ex-libérale battue aux élections du 7 avril - militait ouvertement pour le SLR.

L'autobus inadapté

Dans son étude datée de mars 2013, la firme AECOM conclut qu'une desserte par autobus rapides «ne peut répondre à la demande d'un corridor aussi achalandé» en raison de ses limites, de ses impacts et de son coût. «Seul le SLR permet de répondre à la demande estimée dans le corridor A10 - centre-ville à partir de 2021 jusqu'en 2061 et au-delà.» Une simple amélioration du réseau actuel d'autobus coûterait 1,2 milliard de dollars, «sans avoir les bénéfices de la performance» du SLR.

Or, le gouvernement Couillard a indiqué qu'AECOM a fait plus tard un «rectificatif» à son étude. La facture serait plutôt de 890 millions. Cette estimation correspond à celle du ministère des Transports, selon le cabinet de M. Poëti.

Quant au SLR, AECOM évalue son coût entre 1,4 et 2 milliards. Ce sont les mêmes chiffres qu'avançaient l'AMT et le gouvernement Marois en avril 2013.

Robert Poëti a appris dans La Presse le contenu de l'étude d'AECOM. «Je ne l'ai pas, ce rapport-là!», a-t-il lancé. Selon lui, prétendre que le SLR coûterait moins de 2 milliards, et même 1,4 milliard, c'est «complètement» sous-estimer la facture. Cette évaluation «ne correspond absolument pas» à celle de son ministère. Il est acquis, selon lui, qu'un SLR coûterait plus de 2 milliards de dollars. Et c'est sans compter les coûts d'exploitation, deux fois plus élevés, selon lui, que l'option du bus. «C'est non négligeable», a-t-il souligné.

À son cabinet, on ajoute qu'il est trompeur d'évoquer un coût de 1,4 milliard puisque cette facture correspond à un scénario de SLR qui a déjà été écarté.

Robert Poëti accuse le gouvernement Marois de ne pas avoir prévu le SLR dans son programme sur les infrastructures, qui s'échelonne sur dix ans. Selon lui, le Parti québécois avait uniquement réservé un montant de 28 millions pour le «bureau de projet responsable de la réalisation du SLR sur le futur pont Champlain», dirigé par l'AMT. «Je n'ai vu nulle part dans le programme d'infra-structures un sou réservé pour le SLR, sauf pour l'étude. Il était aligné là-dessus, mais il y a un bout qui a été oublié!», a-t-il lâché.

Le ministre a réitéré qu'il y aura «un corridor exclusif et protégé» pour le transport collectif sur le nouveau pont Champlain, tel que convenu avec Ottawa. Le gouvernement n'a pas encore décidé si ce sera le SLR ou un système de bus. «C'est sûr qu'il va y avoir du transport collectif, et il va être supérieur à ce qu'on a actuellement», a-t-il conclu.