Après 3474 piétons et cyclistes frappés par des voitures sur son territoire en dix ans, le Plateau-Mont-Royal a décidé de prendre le taureau par les cornes. Pour rendre l'espace public plus sécuritaire, le réseau cyclable sera doublé, les limites de vitesse passeront à 40 km/h sur les artères et 30 km/h sur les rues et 22 intersections dangereuses seront réaménagées.

Cette véritable «révolution cycliste», présentée ce matin par le maire de l'arrondissement, Luc Ferrandez, sera implantée graduellement dans les prochaines années. «Si nous n'arrivons pas à implanter ces mesures, ça voudra dire que nous sommes inutiles et je remettrai ma démission», a assuré le maire.

Une situation «intolérable»

Flanqué de membres de son parti, Projet Montréal, et de la mairesse de l'arrondissement d'Outremont Marie Cinq-Mars, M. Ferrandez a longuement cité la liste des cyclistes et piétons qui ont été victimes d'un accident ces derniers mois. Il a précisé que la mort de Mathilde Blais, survenue fin avril, avait fait souffler «un vent de solidarité et de changement».

«On ne peut plus tolérer cette situation. Le temps où nous accusions les cyclistes et les automobilistes est terminé. Je pense que le père ou la mère de la prochaine victime va poursuivre la Ville et va gagner, il va gagner les 10 millions que ça coûterait pour changer la situation.»

Le programme du Plateau pour sécuriser son territoire coûtera un million cette année, une somme provenant essentiellement des économies du déneigement. Des interventions plus lourdes, et vraisemblablement plus coûteuses, seront effectuées dans les prochaines années.

Mettre les camions au pas

La liste est longue : on veut réduire les limites de vitesse sur les artères et les rues du réseau local, tout en réaménageant ces chaussées pour les rendre plus étroites et moins propices aux excès de vitesse. «La rue doit parler autant que la signalisation», rappelle le maire.

Vingt-deux intersections dangereuses, comme Mont-Royal-Du Parc, Sherbrooke-Saint-Laurent, Cherrier-Lafontaine, Rachel-Papineau et Mont-Royal-Papineau, subiront une reconfiguration complète, avec des îlots centraux, des saillies de trottoir, de la peinture au sol, des bornes et des sas.

On demandera en outre au Service de police de la Ville de Montréal d'appliquer rigoureusement les interdictions de circuler touchant les camions. «La police a de la difficulté à appliquer les règles du camionnage : il y a un préjugé favorable parce qu'ils sont au travail estime, M. Ferrandez. Il faut travailler avec le SPVM pour rétablir le respect des règlements.»

Les rues Mentana et Saint-André deviendront des «vélorues», où seule la circulation automobile locale sera tolérée.

Ces modifications devront se faire en concertation avec la ville centre et le ministère des Transports, indique le maire Ferrandez. Il estime que son arrondissement pourra remplir les critères de densité et de configuration des rues locales pour demander une limite de 30 km/h - un exemple qu'Outremont voudrait suivre, a indiqué la mairesse Cinq-Mars qui entend soumettre la question à son conseil d'arrondissement.

Enfin, comme l'a fait l'arrondissement de Saint-Laurent, tous les camions de la voirie du Plateau seront équipés de protecteurs latéraux, qui font en sorte que piétons et cyclistes ne se retrouvent pas sous le véhicule en cas d'accident.

Pour Richard Bergeron, chef de Projet Montréal et de l'opposition officielle à l'hôtel de ville, ces mesures vont faire en sorte que «l'espace public appartienne à tout le monde. Ça n'a pas de bon sens qu'on ait cédé cet espace à un seul groupe de citoyens, les automobilistes.»