Le mercredi 11 septembre, les Montréalais ont un douloureux rendez-vous qui revient tous les trois ans: le dépôt du rôle d'évaluation foncière. En 2010, la hausse moyenne avait été de 23,5%, un chiffre qui cache de grandes disparités d'un arrondissement à l'autre. Les propriétaires les plus durement touchés avaient été ceux de Rosemont-La Petite-Patrie, du Sud-Ouest et du Plateau-Mont-Royal.

Rien d'étonnant à ce que ce dernier arrondissement ait vu naître un mouvement de protestation populaire, Montréal pour tous. Trois semaines avant le dépôt du prochain rôle, ce collectif réitère sa principale demande: un gel de l'impôt foncier.

«Il y a de gros problèmes avec les rôles d'évaluation, estime Pierre Pagé, du collectif Montréal pour tous. Les gens sont pompés, crinqués. Il est temps de faire le ménage là-dedans. Nous, tant qu'on ne nous aura pas démontré que toutes les sources d'économie ont été appliquées, on demande un gel de taxes pour trois ans.»

Environ 20% en moyenne

Quelle sera la hausse d'évaluation foncière cette année? En juillet dernier, La Presse a rapporté les résultats d'une recherche de la firme JLR Recherche immobilière, qui a analysé 15 000 transactions en 2012. Leur verdict: une hausse moyenne d'environ 20% pour le prochain rôle. Mais encore une fois, le Plateau et le Sud-Ouest, ainsi que Saint-Laurent, pourraient être plus durement touchés.

Rien pour calmer la grogne, convient M. Pagé. «Les gens qui se font augmenter leurs taxes voient les révélations à la commission Charbonneau et se demandant où sont les services. J'ai l'impression que les politiciens vont toujours trouver la même logique de dire qu'ils ont besoin de plus d'argent.»

Une méthode «plutôt juste»

Chercheur à l'Institut national de recherche scientifique, Pierre J. Hamel connaît bien ces mouvements citoyens en guerre contre les hausses d'impôt. Il est fréquemment invité à donner des conférences sur le sujet. «Les premières victimes de ces hausses, ce sont les résidants de longue date, note-t-il. On sait que le Plateau, c'était le quartier de mixité sociale idéale. Quand c'est très recherché, ça finit par expulser les gens qui ont moins de revenus.»

N'en déplaise aux citoyens mécontents, l'impôt foncier est pourtant une méthode plutôt juste pour répartir le fardeau fiscal, estime M. Hamel. «Ce n'est pas un monstre. Je trouve que c'est un très bel impôt, théoriquement assez juste: plus ta maison a de la valeur, plus tu paies.»

Le hic, c'est que la propriété d'une maison reflète parfois des revenus passés, le cas typique étant celui des retraités. «Si les taxes doublent, ça chamboule leur budget. Le même phénomène se reproduit dans les quartiers centraux de grandes villes.»

Le système d'évaluation foncière au Québec est reconnu comme l'un des meilleurs au monde, rappelle-t-il. Geler l'évaluation foncière peut mener à des aberrations, tandis que les programmes d'aide parfois proposés ne sont que «des soulagements passagers».

«S'il y avait moyen de faire plaisir à tout le monde, les politiciens ne sont pas imbéciles: ils le feraient. Quelque part, il faut se réjouir que les maisons prennent de la valeur. Sinon, c'est Detroit.»