Le gouvernement du Québec ne baisse pas la garde. Pour la deuxième fois en trois mois, le ministre des Affaires municipales, Sylvain Gaudreault, a téléphoné jeudi au maire de Montréal, Michael Applebaum, afin d'obtenir des explications sur l'administration de sa ville.

Le ministre a ainsi réagi aux révélations de La Presse selon lesquelles près du tiers des nominations de cadres dans la première moitié de 2012 s'est fait sans qu'il y ait d'appel de candidatures et que 80 % de ces dossiers ne sont pas conformes à la politique montréalaise de la main-d'oeuvre. Ce sont les «constats troublants» que fait la Commission de la fonction publique de Montréal dans son rapport annuel de 2012, qui sera déposé le mois prochain au conseil municipal.

Malgré lui, le ministre s'est retrouvé au centre de tirs croisés. D'un côté, il y a la dénonciation de la Commission et son souhait que son statut et ses pouvoirs soient explicitement inscrits dans la Charte de Montréal. De l'autre côté, la Ville croit pouvoir faire l'embauche de son personnel de façon intègre sans être surveillée par la Commission, surtout depuis que le processus d'embauche a été centralisé en 2011.

Sylvain Gaudreault a demandé au maire Michael Applebaum de lui faire parvenir un avis sur la question. Une fois qu'il aura le portrait d'ensemble, le ministre entend trancher.

«Je ne suis pas en train de chaperonner Montréal. Mais je pense qu'il y a actuellement une demande sociale pour que l'on suive les choses de près. C'est ma responsabilité comme ministre de le faire», a déclaré M. Gaudreault lors d'un entretien avec La Presse.

Quant à savoir si Montréal lui donne du fil à retordre, M. Gaudreault a laissé tomber un petit rire avant de souligner que «ça ne prend pas de temps pour être rappelé». «On s'adapte aux circonstances. À Laval, on a désigné deux vérificateurs. À Montréal, on a collaboré pour la mise en place du comité [de révision de l'attribution des contrats] présidé par Jacques Léonard», a rappelé M. Gaudreault.

Le ministre s'est entretenu avec le maire Applebaum quelques minutes avant la tenue d'une conférence de presse convoquée par le directeur général de la Ville, Guy Hébert. D'entrée de jeu, ce dernier s'est dit «franchement estomaqué» par les conclusions du rapport de la Commission. C'est, selon lui, une «pseudo-crise» remplie de «demi-vérités».

«Je veux être clair: l'arbitraire, le copinage administratif et le favoritisme n'ont pas leur place à la Ville de Montréal», a soutenu M.Hébert qui a dit se sentir attaqué. Il a donné l'assurance qu'il n'avait jamais répondu à une demande politique.

La chef de l'opposition officielle, Louise Harel, a déjà annoncé que son parti, Vision Montréal, déposera une motion au conseil municipal afin que soient consolidés le statut et les pouvoirs de la Commission de la fonction publique. «La Commission doit avoir les moyens de ses mandats pour garantir qu'il n'y a pas d'arbitraire dans l'embauche, notamment des cadres», a dit MmeHarel.

Le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, a demandé au gouvernement de clarifier la situation, et a lui-même refusé de prendre parti.