Plus de 60 000 emplois perdus en 10 ans, 20 millions de mètres carrés de terrains contaminés, des usines qui ferment l'une après l'autre: Montréal est victime d'une «désindustrialisation galopante» qui commande une intervention énergique de l'administration Tremblay, estime la chef de l'opposition officielle, Louise Harel.

En point de presse dans le bruit parfois assourdissant des camions qui sillonnent le boulevard L'Assomption, la chef de Vision Montréal a voulu «sonner l'alarme», hier, sur le déclin constant du secteur manufacturier montréalais. Une des premières mesures serait de «donner un coup de pouce majeur en matière de décontamination», a-t-elle expliqué.

En 2009, un rapport de la Commission sur le développement économique a établi à 800 millions de dollars les besoins en la matière «pour une superficie équivalant à 6% de la ville», a illustré Réal Ménard, maire de l'arrondissement de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve, élu sous la bannière de Vision Montréal. Le plus récent programme de décontamination, ClimatSol, a disposé d'un budget de 50 millions entre 2007 et 2012. «Il y a toujours 8 millions inutilisés, tant le programme n'est pas fonctionnel, trop exigeant pour les entrepreneurs», affirme-t-il.

Le parti de l'opposition officielle a également rappelé que 5 des 19 parcs industriels de l'île ne disposent pas d'infrastructures adéquates pour l'eau et les égouts.

Sans nostalgie

Reconnaissant que la Ville de Montréal ne peut relancer à elle seule une industrie en déclin, Louise Harel demande la tenue d'un forum sur l'emploi manufacturier, auquel participeraient Québec et les partenaires socioéconomiques. Selon Statistique Canada, la métropole a perdu 2277 entreprises de fabrication en une décennie: elles sont passées de 5941 en 2000 à 3664 en 2011. Les emplois ont suivi la même courbe, leur nombre chutant de 40%.

«Il ne s'agit pas de maintenir la nostalgie pour l'économie du passé, mais de continuer d'avoir l'économie la plus diversifiée du Canada, dit Mme Harel. Tout le monde ne va pas occuper un emploi d'informaticien ou de technicien en spectacle.»

L'an dernier, le maire Gérald Tremblay avait dévoilé un ambitieux plan de développement de l'Est, dont l'objectif était d'investir 4,6 milliards en cinq ans, dont 550 millions proviendraient de la Ville. On prévoyait 8 millions pour la décontamination des terrains industriels, le lotissement des terrains autour des gares et un lien entre le boulevard de L'Assomption et le port.

Un an plus tard, ce qu'il manque à ce plan, estime Mme Harel, «c'est d'être appliqué, d'être mis en vigueur».

La chef de Vision Montréal «a 15 ans de retard», a répliqué de façon cinglante Richard Deschamps, responsable du développement économique au comité exécutif. «La tendance qu'elle évoque, elle frappe l'ensemble des économies occidentales, il n'y a rien de nouveau. Qu'a-t-elle fait lorsqu'elle était en position de pouvoir?»

Il estime que la sortie de Mme Harel a «une certaine forme de malhonnêteté, de mauvaise méthodologie». «Elle ne prend qu'une partie de l'équation. Dans les 10 dernières années, il s'est gagné entre 100 000 et 150 000 emplois à Montréal, des emplois de meilleure qualité. Les Montréalais se sont diversifiés, se sont éduqués. Mme Harel allume des feux uniquement pour le plaisir de les allumer.»

Il assure que l'administration Tremblay «continue de travailler à l'amélioration de nos parcs industriels» avec divers programmes d'investissement et de soutien aux entrepreneurs.