Il mesure à peine quelques millimètres, mais pourrait tout de même causer pour «plusieurs dizaines de millions» de dégâts à Montréal. Découvert l'été dernier, l'agrile du frêne, insecte ravageur arrivé d'Asie, s'est déjà répandu dans un rayon de 17 km et menace de tuer le cinquième des arbres de Montréal d'ici 10 à 15 ans.

À l'heure du ménage printanier, l'avertissement est sérieux. Montréal interdit à ses citoyens de jeter les branches d'arbres, peu importe l'essence, avec le reste des résidus verts. La Ville leur demande plutôt de les attacher ensemble, de les mettre en bordure de rue et d'appeler le 311 pour qu'on vienne les déchiqueter.

L'enjeu est de taille. Observé pour la toute première fois le 19 juillet 2011, l'agrile a maintenant été détecté à huit endroits dans l'île. D'abord découvert dans l'Est, il a maintenant fait son apparition dans un parc de l'arrondissement de Saint-Laurent. Dix-sept kilomètres séparent les deux lieux touchés les plus éloignés.

Si la lutte contre l'insecte échoue, la Ville évalue que l'agrile pourrait détruire les 100 000 frênes recensés à Montréal. Ces arbres jouent un rôle important dans la métropole. Près de la moitié, 45 000, se trouvent en bordure de rue et servent à lutter contre les îlots de chaleur. Ils permettent également de ralentir les eaux de ruissellement et contribuent à améliorer la qualité de l'air. Bref, Montréal dit ne pas avoir les moyens de voir son mince couvert végétal davantage troué.

«Le remplacement de tous ces frênes de rue pourrait coûter plusieurs dizaines de millions», appréhende la Ville. Il en coûte de 500$ à 2000$ pour abattre et remplacer un arbre, précise Philippe Sabourin, porte-parole municipal.



15 arbres abattus

Pour l'instant, une quinzaine d'arbres ont été abattus. Fait inquiétant, l'insecte a été détecté au Jardin botanique, au coeur du bois des frênes. L'endroit abrite 475 des quelque 700 arbres de cette espèce plantés sur le terrain au pied du Stade olympique. Un arbre y a été abattu à la fin du mois de novembre et le parasite n'aurait pas été détecté depuis. «On a l'expertise pour faire le suivi», assure Karine Jalbert, porte-parole de l'Espace pour la vie.

Or, il appert que l'abattage ne serait pas efficace pour contrer la progression de l'insecte. Au contraire. «Des données scientifiques indiquent que cela produirait un effet opposé à l'objectif ciblé en contribuant à disperser davantage l'insecte», écrit la Ville.

Pour contrer la progression, Montréal a plutôt décidé d'acheter un nouvel insecticide, qui a reçu une homologation d'urgence du gouvernement fédéral. Le TreeAzin est décrit comme un biopesticide sans effet sur la santé. Aucun permis n'est requis pour en épandre. De plus, celui-ci est injecté directement dans les arbres, ce qui limite les risques de contact. Montréal a acheté pour 62 700$ du produit, soit assez pour traiter 700 arbres.

Ce traitement sera administré aux arbres entourant les frênes atteints afin de créer une barrière. Il reste à en voir l'efficacité, car l'agrile se déplace par la voie des airs et attaque les arbres en pondant jusqu'à 275 larves. Ce sont ces larves qui finissent par tuer les arbres en deux à cinq ans en endommageant la couche sous l'écorce.