Aucune accusation criminelle ne sera déposée contre des fonctionnaires de la Ville de Montréal, en particulier le contrôleur général Pierre Reid, pour avoir intercepté les courriels du vérificateur général Jacques Bergeron et du président du conseil municipal Claude Dauphin.

Par communiqué, le commissaire à la lutte contre la corruption, Robert Lafrenière, a annoncé mercredi cette première décision dans la saga qui a provoqué une tempête à l'hôtel de ville le printemps dernier. La découverte des enquêtes administratives qui avaient visé le vérificateur général, puis le président du conseil municipal, avait provoqué le départ du contrôleur général Pierre Reid en avril.

Le ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil, avait alors chargé M. Lafrenière de se pencher sur l'ensemble du dossier. Plus spécifiquement, il avait demandé une enquête sur les méthodes d'enquêtes internes utilisées par la Ville de Montréal, notamment l'interception des communications électroniques.

«Les enquêteurs de la Sûreté du Québec travaillant au sein de l'Unité permanente anticorruption (UPAC) ont transmis toute la preuve recueillie au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) qui nous a informés, après l'étude et l'analyse du dossier, qu'aucune poursuite criminelle ne sera déposée dans ce dossier», a précisé le commissaire.

«Dans le meilleur intérêt de la population»

Il ne s'agit que d'un volet du mandat confié à l'UPAC, ajoute-t-on: «D'autres enquêtes et vérifications en relation avec des allégations concernant la gestion de la Ville de Montréal sont en cours.»

Le président du comité exécutif de la Ville de Montréal, Michael Applebaum, a déclaré avoir pris acte de la décision. «C'est clair maintenant, l'UPAC a conclu qu'il n'y avait pas d'acte criminel. Je questionne maintenant les élus qui ont critiqué M. Reid et la Ville de Montréal. M. Reid a agi dans le meilleur intérêt de la population.» Il a précisé que l'ex-contrôleur général est toujours à l'emploi de la Ville: il remplit des «mandats spéciaux» à la demande du directeur général. Il prendra sa retraite en juin prochain.

Du côté de l'opposition, le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, a qualifié la décision de l'UPAC de «décevante». «Le caractère immoral des actes posés demeure entier. Il y avait lieu de trouver des responsables, les idéateurs de ces écoutes, y compris dans la sphère politique. Espérons que tout ne tournera pas comme ça avec l'UPAC.»

Il rappelle qu'il attend toujours les résultats des deux plaintes qu'il a déposées à la Sûreté du Québec en 2009, concernant les dossiers des compteurs d'eau et du Faubourg Contrecoeur. «Est-ce qu'on va avoir de la chair, un moment donné? On veut de la chair! Ça fait trois ans; ça ne va pas assez vite.»

Les poursuites du vérificateur général et de l'ex-président du conseil municipal Claude Dauphin contre la Ville sont par ailleurs toujours pendantes devant les tribunaux. Dans le premier cas, on attend dans les prochaines semaines la décision de la juge Guylène Beaujé, concernant notamment le paiement des honoraires d'avocat et le retrait de certains courriels de la preuve.

En février 2011, le conseil municipal de Montréal, dominé par le parti du maire Tremblay, avait également demandé à Québec de se pencher sur les agissements du vérificateurs général. On le soupçonne notamment d'avoir favorisé sa belle-soeur dans l'octroi d'un contrat de traduction et d'avoir fractionné illégalement un contrat. Près d'un an plus tard, «on n'a toujours aucune nouvelle», a précisé M. Applebaum.