Les Montréalais devront s'y faire: les hausses de taxes pour rafistoler le réseau d'eau, négligé pendant des décennies, sont là pour rester. Les quelque 8000 km de réseau de distribution d'eau et d'égouts seront littéralement traités aux petits oignons en 2012, avec des investissements frôlant les 400 millions, a-t-on appris hier lors de l'étude du budget.

Et des investissements, il en faudra encore pour plus de 3 milliards en 10 ans, a précisé Réjean Lévesque, directeur du Service de l'eau, devant les membres de la commission des finances réunis à l'hôtel de ville. «Dans 10 ans, on va avoir atteint un niveau de fiabilité qui se sera beaucoup amélioré. Avec le milliard investi depuis 10 ans, il y a déjà eu un changement majeur.»

En 2012, on prévoit refaire 65 km de conduites d'eau et d'égouts, moins de 1% du réseau montréalais, un objectif de loin supérieur aux 43 km refaits cette année. Pour la première fois, la taxe d'eau payée par les Montréalais ira directement dans un fonds consacré au réseau qui ne pourra légalement être utilisé pour d'autres dépenses. C'est également cette année que les premiers compteurs d'eau électroniques, qui peuvent être lus à distance, seront installés dans des commerces, industries et institutions qui sont de grands consommateurs d'eau. Les coûts d'installation évalués à 55 millions leur seront entièrement refilés, a assuré l'administration Tremblay la semaine dernière.

Expertise renforcée

Contrairement au contrat de 195 millions annulé en 2009 dans la controverse, cette fois, «on a bien pris notre temps», assure M. Lévesque. «C'est la leçon la plus importante. À l'époque, tout avait été fait de façon accélérée; on avait tellement de problèmes à régler, de choses à faire.»

Avec des centaines de millions en contrats accordés chaque année, le Service de l'eau est vulnérable à la collusion des entrepreneurs, comme l'a démontré la récente découverte d'un cartel des égouts, avoue le directeur. «C'est assez dur pour nous d'en faire la preuve. Ce n'est pas facile de contrôler ces choses-là à l'interne. La commission Charbonneau devrait beaucoup nous aider.» Il affirme que le Service de l'eau a considérablement renforcé son expertise interne depuis cinq ans. «On a repris le contrôle de la maîtrise d'oeuvre de tous nos travaux, de la surveillance, et on a dynamisé la compétition.»

On estime que les fuites font perdre 40% des quelque 600 millions de mètres cubes d'eau potable produits annuellement. L'évaluation est théorique, puisqu'il est difficile d'estimer l'état des conduites avant qu'elles ne se brisent. Le portrait est plus précis en ce qui concerne les égouts: 50% du réseau a fait l'objet d'une analyse visuelle, 20% de tests plus poussés.

L'objectif d'ici à 2020, a annoncé M. Lévesque, est de réduire de 25% la production d'eau à Montréal, meilleure indication que le problème des fuites est maîtrisé. «Ce volume, c'est ce qu'il faudrait pour alimenter en eau 750 000 personnes, précise le fonctionnaire. Depuis 2001, nous avons réussi à diminuer notre production de 11%.»