Le système de vélos en libre-service BIXI ne coûtera pas un cent de plus aux contribuables montréalais, a promis mardi le maire Gérald Tremblay au lendemain de la publication d'un rapport cinglant du vérificateur général, qui laisse justement entendre l'inverse.



«Nous allons continuer de maintenir ce service sans demander d'effort supplémentaire aux contribuables», a assuré le maire de Montréal devant le conseil municipal.

Les dirigeants de BIXI «nous confirment qu'ils ont l'intention de faire l'équilibre entre les revenus et les dépenses et de trouver le meilleur moyen avec le secteur privé de se départir de l'exportation», a ajouté Gérald Tremblay.

Il s'est par ailleurs moqué des chefs des deux partis de l'opposition, qui ont suggéré lundi qu'il avait bâclé le lancement de BIXI pour que le système soit inauguré avant les élections de novembre 2009: «L'opposition peut dire ce qu'elle veut, comme de prétendre que je me suis servi de ça pour mon élection en 2009... C'est complètement faux. Vous pensez que, parce qu'il y avait 10 000 usagers du BIXI, ç'a contribué à mon élection? J'ai gagné par beaucoup plus que 10 000 votes.»

En fait, M. Tremblay l'a emporté par près de 22 000 voix sur sa plus proche rivale, Louise Harel.

Le vérificateur général de la Ville de Montréal, Jacques Bergeron, a produit lundi un rapport de 70 pages sur l'aventure BIXI. Il constate que «plusieurs règles élémentaires de gestion ont été négligées ou escamotées».

Il souligne que les contribuables montréalais assument les risques financiers du projet BIXI alors que sa société mère «en conservera tous les bénéfices». Rappelons que la Ville a renfloué in extremis la Société de vélo en libre-service (SVLS), il y a un mois, grâce à un plan de sauvetage de 108 millions (un prêt de 37 millions et des garanties de prêt de 71 millions).

La SVLS doit maintenant se départir avant la fin de l'année de ses activités les plus profitables, c'est-à-dire de l'exportation de BIXI à l'étranger, une condition du ministère des Affaires municipales pour avaliser le plan de sauvetage de la Ville.

L'année dernière, la Société a perdu 7 millions de dollars dans ses activités montréalaises. Ses ventes à l'étranger lui ont rapporté 8,5 millions, pour un bénéfice de 1,5 million. «Paradoxalement, la SVLS a impérativement besoin de l'exportation pour assurer sa rentabilité, mais elle devra se départir de cette activité», note le vérificateur.

Le maire de Montréal s'est voulu rassurant. Selon lui, la vente de la division internationale de BIXI va permettre d'éponger une partie du prêt de 37 millions que la Ville a consenti à la SVLS.

«Je ne peux rien pour le passé, a-t-il dit. Mais pour l'avenir, il faut tenir compte des recommandations du vérificateur. La situation est corrigée. BIXI est un succès, on va trouver une solution pour l'exportation, on va équilibrer les revenus et les dépenses et on va s'assurer qu'il n'y ait pas de coûts pour les contribuables.»

Vision Montréal sort en bloc

Les échanges sur BIXI au conseil municipal ont ensuite dégénéré. Des propos du maire ont entraîné le départ en bloc de tous les conseillers de Vision Montréal, un coup d'éclat rarissime.

L'incident est survenu alors que Gérald Tremblay répondait aux membres de l'opposition, qui déploraient que la Ville se soit engagée pour 108 millions un mois avant le dépôt du rapport du vérificateur. Lundi, la chef de Vision Montréal, Louise Harel, avait soutenu que le plan de sauvetage avait été obtenu grâce à de «fausses représentations».

Le maire a alors affirmé que les partis de l'opposition avaient pu consulter le rapport juste avant le vote sur le plan de sauvetage, à la mi-mai. Mme Harel a répliqué que c'était faux.

«Vous avez des relations privilégiées avec le vérificateur général», a alors lancé le maire Tremblay, suscitant les murmures de plusieurs élus.

Lorsque Mme Harel a demandé au maire de se rétracter, il en a plutôt remis. «Je ne retirerai pas mes paroles, au contraire, je vais en rajouter. Quand votre directeur général (de Vision Montréal) écrit au vérificateur général pour savoir quelle question poser au conseil municipal, à partir de ce moment-là, j'ai raison de dire qu'il y a une complicité entre la chef de l'opposition et le vérificateur.»

La chef de Vision Montréal a alors demandé au maire de déposer ces supposés courriels au conseil. Elle a aussi laissé entendre qu'il les aurait découverts en «espionnant» les courriels du vérificateur. Le maire n'a pas précisé comment il avait pris connaissance de cette prétendue correspondance.

Le nouveau président du conseil, Harout Chitilian, n'a pas demandé à Gérald Tremblay de se rétracter. Pour signaler leur mécontentement, tous les conseillers de Vision Montréal ont donc quitté la salle. Les travaux ont continué, et les élus ont finalement regagné leur place au bout de 15 minutes.