Explosion des coûts et des délais, mauvaise gestion, projet en dérive. Le vérificateur général a égratigné, hier, dans un rapport déposé au conseil municipal, l'ambitieux projet de la STM de refaire la commande centralisée du métro de Montréal. La STM assure toutefois qu'elle a pris les mesures nécessaires pour redresser la situation.

La commande centralisée, cerveau du métro montréalais, est désuète depuis longtemps. Le centre de contrôle a été construit dans les années 60, en même temps que la première ligne de métro.

Devant l'urgence de moderniser ses installations, la Société de transport de Montréal a lancé il y a plus de huit ans un appel d'offres public, remporté par le fournisseur Alstom en juin 2003. Au départ, le projet de 50 millions devait être terminé en janvier 2006, à temps pour l'ouverture des trois stations à Laval. Aujourd'hui, les coûts frisent les 197 millions et la date prévue de mise en service a été reportée à l'automne 2012. Si tout va bien.

Le rapport du vérificateur, Jacques Bergeron, soulève que la STM et le fournisseur ont tous deux sous-estimé la complexité du projet. Par conséquent, le budget prévu ainsi que les échéances étaient irréalistes.

Malgré les nombreux signaux d'alarme, les efforts entrepris n'ont pas été suffisants pour freiner l'explosion des coûts et des retards. «Nos travaux de vérification nous ont permis de constater que, en dépit des reports répétés de la date prévue de fin des travaux et des hausses multiples du budget du projet, la taille fonctionnelle du logiciel à développer n'a jamais été mesurée ni suivie», affirme le vérificateur dans son rapport.

La STM et Alstom ont entretenu une relation tumultueuse depuis que le contrat a été accordé, et ils ont même envisagé de rompre leur collaboration. «On constate rapidement un contexte litigieux s'installer entre les parties, écrit le vérificateur. L'une et l'autre s'accusent mutuellement d'être responsables des retards et des coûts qui en découlent.» Finalement, au terme de nombreux mois de négociations, la STM et Alstom en sont venus à une entente en 2010.

Dans son rapport, le vérificateur souligne que, «avant l'entente de mars 2010, le projet était en dérive autant en ce qui concerne la gestion des coûts que celle de l'échéancier».

Mea-culpa de la STM

«Nous n'avons jamais caché les problèmes que nous a causés l'implantation du projet», a dit hier à La Presse Odile Paradis, porte-parole de la STM. «Nous avons admis que la STM n'était ni préparée ni outillée pour y faire face.»

Mais selon elle, les choses avancent rondement depuis la nouvelle forme de gestion, plus serrée, mise en place au moment de l'accord de principe. «Ce n'est pas encore gagné, mais d'un test à l'autre, c'est encourageant», a-t-elle affirmé.

La technologie a énormément évolué depuis les années 60, ce qui complexifie le projet, a poursuivi Mme Paradis. Sans compter que les trois stations lavalloises, mises en service en 2007, fonctionnent partiellement avec le nouveau système. «Nous avons mal évalué le fossé énorme entre 1966 et les années 2000», a-t-elle dit, en concédant qu'amarrer les deux époques constitue un vrai casse-tête technologique.

Toutefois, l'explosion des coûts ne devrait pas affecter le budget total de Réno-Systèmes, le programme d'entretien des équipements fixes de la STM. Certains travaux prévus n'étant finalement pas nécessaires, l'enveloppe de 963 millions sera respectée.

Une «comédie d'erreurs»

La chef de l'opposition officielle, Louise Harel, a de son côté qualifié le projet de «comédie d'erreurs». Du même souffle, elle a souligné que Vision Montréal avait demandé au vérificateur d'examiner ce contrat en octobre 2010. La deuxième opposition à la Ville, Projet Montréal, a préféré ne pas faire de commentaires.

Les élus débattront du rapport sur la STM aujourd'hui.