Il y a 10 ans, en plein coeur de l'hiver, des centaines de Montréalais ont vu leur voiture remorquée injustement. Ils ont pu savourer une douce revanche la semaine dernière, la Ville acceptant de leur verser jusqu'à 375$ en dédommagement.

Selon les évaluations de la Ville, quelque 300 automobilistes pourraient se prévaloir de cette offre, ce qui représenterait un débours d'environ 65 000$, auquel s'ajoutent des frais d'avocats de 80 000$. Selon l'avocat qui pilote le dossier, Me François Lebeau, quelque 1700 automobilistes pourraient pourtant réclamer leur dédommagement en toute légitimité, mais la grande majorité d'entre eux ne se manifesteront pas. «C'est toute la problématique des recours collectifs, estime le vétéran de ce type de processus - il en a représenté une centaine en trois décennies de pratique. La grosse difficulté, c'est de convaincre les gens de réclamer leur dû.»

Cette victoire est d'abord celle d'un automobiliste montréalais, Marc Denoncourt, dont la voiture a été remorquée le 1er février 2000 au matin. La veille, à 22h30, il s'était garé devant son domicile, rue Tupper, alors qu'aucune signalisation ne l'interdisait. Comme elle l'a fait pour des milliers d'automobilistes cet hiver-là, et l'hiver suivant, la Ville venait de violer un de ses règlements, qui impose notamment de signaler avant 20h la veille le déneigement prévu le lendemain. M. Denoncourt a contesté sa contravention de 92$ et son remorquage et a gagné sa cause. Il a par la suite appris que d'autres automobilistes avaient été victimes de la même injustice et a déposé, le mois suivant, une demande de recours collectif. Celui-ci a été autorisé l'année suivante, en mars 2001.

Selon les statistiques fournies par Me Lebeau, 14 500 automobilistes ont été remorqués lors de ces hivers, à cause du déneigement. En réclamant 300$ par personne lésée, notamment pour stress, perte de temps et privation du véhicule, en plus du remboursement de la contravention de 92$, on arrivait dans un premier temps à la rondelette somme de 5,7 millions réclamés à la Ville de Montréal.

La somme a été considérablement diminuée par la suite. D'abord, 10 000 automobilistes ont plaidé coupables, tandis que 2900 ont obtenu un retrait administratif de la contravention. Mille sept cent vingt automobilistes ont contesté et obtenu un acquittement en cour municipale. Toujours pour la même raison: le règlement imposant un délai minimal avant le remorquage n'avait pas été respecté.

Problème «réglé»

À la Ville, le porte-parole Gonzalo Nunez affirme que le problème est aujourd'hui «réglé car l'ensemble des arrondissements respectent la réglementation en vigueur».

La semaine dernière, le comité exécutif a entériné une entente à l'amiable offrant aux automobilistes qui ont été acquittés 225$, plus 150$ en frais d'avocat s'il y a lieu. Les procureurs du recours, la firme Unterberg, Labelle, Lebeau, ont droit à 80 000$. Comme le veut la norme, cette entente se fait «sans aucune admission de responsabilité de part et d'autre». Les deux parties ont rendez-vous le 9 mai devant un juge de la Cour supérieure qui devrait approuver l'entente, laquelle sera annoncée par avis public dans les pages des journaux et sur le site internet de la Ville vers la fin du mois.