Le vérificateur général de la Ville de Montréal a adressé hier après-midi cinq mises en demeure à de hauts fonctionnaires de la Ville. Jacques Bergeron demande à André Harel, président du comité de vérification, Pierre Reid, contrôleur général, Yves Grimard, chef de la division des enquêtes et analyses, John Broderick, chargé d'enquêtes et analyses à la division des enquêtes, et Michel Natel, conseiller en sécurité informatique, de lui restituer l'ensemble des documents et renseignements qu'ils ont obtenus lorsqu'ils l'ont surveillé.

Entre le mois de mars 2010 et le mois de janvier 2011, le service des enquêtes internes de la Ville a ouvert, lu et analysé les courriels de M. Bergeron, notamment la correspondance qu'il a eue avec son avocat. Une caméra a aussi été installée devant la porte d'entrée du bureau du vérificateur aux Cours Mont-Royal, rue Metcalfe. Ces agissements, dit la mise en demeure, sont illégaux et injustifiés, et ils portent atteinte à l'intégrité, à l'autonomie et à l'indépendance du vérificateur.

«Évidemment, il s'agit de récupérer l'ensemble des documents obtenus, dit Gilles Corriveau, porte-parole du vérificateur. Il faut comprendre que le vérificateur a reçu une première caisse de documents il y a quelques semaines, sans aucun lexique ni référence. Maintenant, il demande l'ensemble des documents, l'ensemble des copies qui ont pu être faites de ces documents et la liste des personnes à qui ils ont été remis dans un délai de 72 heures.»

La mise en demeure, signifiée hier d'après-midi, condamne sans détour la surveillance dont le vérificateur a fait l'objet. «Nous considérons que vous avez engagé votre responsabilité à titre de fonctionnaire ou représentant de la Ville, mais que compte tenu de l'ampleur de l'intrusion, de l'illégalité de vos agissements et de la négligence grossière ou l'aveuglement volontaire dont vous avez fait preuve quant à vos droits, vous avez également engagé votre responsabilité personnelle à l'égard de notre client», peut-on lire.

Plus tôt cette semaine, les révélations au sujet de la surveillance dont M. Bergeron a fait l'objet ont suscité de vives réactions. Le maire Gérald Tremblay a nié toute responsabilité. André Harel, le président du comité de vérification interne, soupçonnant des irrégularités, a demandé à Pierre Reid de faire enquête. Le rapport d'enquête, de deux pages, sera déposé à l'assemblée du conseil municipal lundi, tout comme celui que le vérificateur a consacré à sa propre surveillance.

Au cabinet du maire, on juge que cette mise en demeure arrive à un moment étonnant. «Cela survient alors que le maire a annoncé son intention de transmettre, par une motion qui va être déposée lundi, le dossier au ministre des Affaires municipales, dit Martine Painchaud, attachée de presse du cabinet du maire et du comité exécutif de la Ville de Montréal. On demande toutes les copies des documents comme si on voulait mettre un terme à toute forme d'enquête et au suivi du rapport du bureau de Vérification.»

Le service juridique de la Ville étudie la réponse à apporter, et l'attaché de presse de M. Bergeron n'a pas voulu détailler quel recours pourrait être intenté contre les cinq fonctionnaires: «Le vérificateur est préoccupé par ses droits qui ont été violés illégalement. Les propos qui sont tenus (contre lui) doivent cesser, et les documents qui circulent doivent lui être rendus. On est arrivés à une certaine limite, et maintenant on passe à une autre étape.»