Le projet revu de l'échangeur Turcot reçoit finalement l'aval solidaire du comité exécutif de la Ville de Montréal, maintenant qu'il a entraîné le départ de cet exécutif du chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, qui s'est fait montrer la porte parce qu'il refusait de se rallier.

Après la présentation à huis clos du ministre des Transports Sam Hamad, vendredi en fin d'après-midi, le maire de Montréal Gérald Tremblay a fait savoir aux médias que le projet bonifié jouissait désormais de l'appui de tout l'exécutif.

«Tous les membres du comité exécutif sont solidaires de cette décision», a fait savoir le maire.

Selon ses dires, le projet d'échangeur a été «considérablement amélioré» pour tenir compte des revendications des Montréalais, particulièrement au chapitre du transport collectif, de la hauteur des remblais, de l'aménagement urbain et du nombre d'expropriations nécessaires pour reconstruire l'imposant échangeur.

«Le projet qui a été présenté aujourd'hui n'est pas le projet qui était sur la table à dessins» auparavant, a-t-il assuré.

Le design du projet demeure confidentiel jusqu'à sa présentation officielle par le ministère, mardi prochain. On sait cependant qu'il prévoit encore des remblais, mais moins hauts que prévu à l'origine. Une voie réservée est maintenant prévue pour le transport en commun, mais elle inclura le transport par voiture ayant au moins deux passagers.

Le maire faisait pourtant partie de la coalition qui avait présenté en avril dernier une solution de rechange, plus audacieuse et plus coûteuse, un modèle circulaire.

Mais comme c'est le ministère des Transports du Québec qui doit payer pour la reconstruction de l'échangeur, et que le ministère prône un projet beaucoup moins ambitieux et coûteux, le maire et le reste de l'exécutif se sont rangés, se disant qu'ils pourront toujours continuer à l'améliorer d'ici un an.

«C'est le projet du gouvernement du Québec, qui est financé à 100% par le gouvernement du Québec. Le conseil des ministres a déjà approuvé les deux décrets. Le projet va de l'avant. Nous avons décidé que c'était mieux qu'on ait un projet et d'accompagner le gouvernement pour continuer à le bonifier au cours de la prochaine année», a résumé le maire Tremblay.

Tremblay «fidèle» à Québec plutôt qu'aux Montréalais, dit Bergeron

Si l'exécutif peut aujourd'hui être solidaire face au projet bonifié, c'est que le chef d'un des partis d'opposition, Richard Bergeron, de Projet Montréal, s'est fait montrer la porte de cet exécutif par le maire, jeudi, justement parce qu'il refusait de se rallier.

M. Bergeron a d'ailleurs rencontré la presse, en matinée, avant la présentation du projet par le ministre Hamad, pour affirmer que c'est plutôt le maire qui avait lâché la coalition et avait préféré retrouver sa famille libérale. Le maire de Montréal a déjà été député libéral et ministre de l'Industrie et du Commerce de 1989 à 1994.

«C'est cette unanimité politique montréalaise que brise Gérald Tremblay en se ralliant à la dernière évolution du mauvais projet du MTQ. Gérald Tremblay rejoint, par le fait même, sa famille politique à Québec. Gérald Tremblay est fidèle à sa famille politique à Québec plutôt que d'être fidèle aux Montréalais», a tonné M. Bergeron.

Le chef de Projet Montréal a égratigné tant le projet du ministère que le ministère lui-même. «D'une certaine manière, le MTQ va agir en cowboy à Montréal et celui qui officiellement est le shérif de Montréal se déclare absent et se met plutôt du côté du cowboy», a-t-il lancé avec sarcasme.

M. Bergeron a prévenu que le combat contre le nouveau projet d'échangeur Turcot ne faisait que commencer. Il affirme avoir plusieurs alliés dans sa lutte contre ce projet d'échangeur.

«Le combat Turcot n'est pas terminé; il ne fait que commencer. Moi, je retrouve mon droit de parole complet. Je n'ai plus de devoir de solidarité avec quiconque, sinon avec les membres de ma formation politique. Et je l'avais dit à Gérald Tremblay: on va s'entredéchirer sur la place publique, ça ne sera pas joli. Et si vous croyez que ça va renforcer Montréal, vous vous trompez», a-t-il averti.

Harel déçue

De son côté, la chef d'un autre parti d'opposition, Louise Harel, de Vision Montréal, s'est dite déçue du projet revisité. Contrairement à M. Bergeron, elle a attendu de voir le nouveau projet du ministère des Transports avant de le rejeter ou de le critiquer.

Après la présentation, elle a avoué sa «déception» puisque les conditions qu'elle jugeait «non négociables» n'y sont pas.

«Il ne doit pas y avoir de remblais, des remblais qui atteignent un troisième étage, presque 24 pieds, et qui seraient comme un mur qui va isoler les populations dans Côte St-Paul et St-Henri. Non à l'expropriation évidemment et, également, augmentation du transport en commun. Pour toutes ces raisons, vous comprendrez notre grande insatisfaction», a résumé Mme Harel.

Elle admet qu'il n'est pas question non plus de revenir avec le coûteux projet d'échangeur circulaire, que le ministère avait rejeté, et elle semble vouloir tenter de trouver un modus vivendi.

«Le ministère a encore pas mal de devoirs à faire pour simplement rencontrer un minimum de satisfaction de la population», a-t-elle opiné.