Le directeur de la Sûreté du Québec (SQ), Richard Deschesnes, veut faire toute la lumière sur Sécur-Action, l'agence de sécurité qui surveille les locaux de son organisation.

Le grand patron de la SQ dit ne pas prendre l'affaire à la légère. Son organisation a été avisée il y a déjà quelques jours des démarches «exceptionnelles» du Service de police de Montréal (SPVM), a-t-il admis. Et mardi soir, le SPVM lui a annoncé qu'il mettait un terme à ses relations avec Sécur-Action, après enquête.

«Nous allons agir avec diligence. Nous avons commencé nos vérifications de bonnes moeurs il y a quelques jours. On veut faire la lumière sur cette affaire, c'est très important», dit M. Deschesnes, qui promet une décision d'ici quelques jours, au plus tard à la mi-octobre.

Sécur-Action surveille les installations du SPVM de façon intérimaire depuis la faillite de l'agence BCIA, au printemps. Bien que Sécur-Action et son président, Éric Beaupré, aient présenté la plus basse soumission pour le contrat annuel, le SPVM a décidé d'écarter l'entreprise, après que le maire de Montréal, Gérald Tremblay, eut demandé une vérification plus approfondie.

L'agence qui surveille les locaux de la police a accès à des renseignements cruciaux. Ses agents de sécurité contrôlent les entrées et les sorties de la police et des visiteurs, qui pourraient parfois être des informateurs.

C'est également l'agence Sécur-Action qui surveille les bâtiments gouvernementaux où loge l'escouade Marteau de la SQ, dans l'est de Montréal, a-t-on appris. Rappelons que l'escouade concentre ses énergies sur l'industrie de la construction.

Informations sensibles

Selon un agent de sécurité privé qui a déjà travaillé au QG de la SQ, rue Parthenais à Montréal, les agents peuvent avoir accès à des renseignements névralgiques. Par exemple, ils pourraient visionner les images transmises par les caméras de surveillance de la résidence du premier ministre Jean Charest.

Richard Deschesnes ne veut pas confirmer cette information ni commenter la question. «Les agents de sécurité ont accès à certaines informations, mais pas les informations les plus sensibles», dit-il.

Au dire de M. Deschesnes, les policiers de la SQ savent comment s'y prendre avec leurs informateurs pour leur éviter les contrôles des gardiens de sécurité. Quoi qu'il en soit, le contrat avec Sécur-Action est résiliable avec un avis de 60 jours «sans qu'il soit nécessaire de motiver la décision».

Surveillance policière

Jean-Guy Dagenais, président de l'Association des policiers provinciaux du Québec, estime que les locaux de la SQ ne devraient pas être surveillés par des agences privées. «Je demande officiellement que, dans un délai raisonnable, la sécurité de tous les bâtiments de la SQ, incluant son quartier général à Montréal, soit assurée par des policiers et des policières de la SQ, comme c'était le cas jusqu'à il y a une dizaine d'années», a-t-il déclaré hier.

Cette revendication heurte l'Association québécoise de l'industrie de la sécurité, qui regroupe la plupart des agences. «Il est plus que temps que la police reconnaisse de façon adéquate les bienfaits des agences privées», a dit la présidente de l'organisme, Lynda Vachon.

Un point de vue que partage Dominique Lemieux, représentant des Métallos, un syndicat qui regroupe des milliers d'agents. M. Lemieux dénonce néanmoins Sécur-Action pour ce qu'il qualifie «d'attitude antisyndicale». «Avec les nouvelles règles du gouvernement Charest, l'accréditation syndicale ne suit plus quand il y a un changement d'employeur, dit-il. Chaque fois que Sécur-Action prend un contrat, les travailleurs doivent se syndiquer à nouveau, mais l'agence fait de fortes pressions pour qu'ils ne se syndiquent pas.»

Sur son site internet, Éric Beaupré affirme diriger un groupe de trois entreprises comptant 1500 employés non syndiqués. Selon lui, la controverse actuelle est en partie provoquée par la volonté des syndicats de prendre la place de ses agences.