Le consortium formé par les fabricants Bombardier et Alstom revient à la charge devant le tribunal et demande l'annulation de la décision de la Société de transport de Montréal (STM) de retourner en appel d'offres international pour le renouvellement de l'ensemble des voitures actuelles du métro.

Dans une requête déposée la semaine dernière en Cour supérieure du Québec, les deux fabricants, qui ont conclu une entente de principe avec la STM, en décembre 2009, estime que la décision de la STM est «illégale» et qu'elle contrevient au processus d'acquisition prévu par le gouvernement du Québec, qui financera le contrat à 75%.

Le 13 juillet dernier, le conseil d'administration de la STM a décidé de lancer un nouvel appel d'offres international après qu'un manufacturier espagnol, Construccionnes y Auxiliar de Ferrocarriles, mieux connu sous l'acronyme CAF, ait manifesté son intérêt à produire la prochaine génération des voitures du métro de Montréal.

La société CAF répondait alors à un avis d'intention international publié au début de cette année par la STM pour se conformer aux exigences du gouvernement du Québec. Cet avis visait à informer les fabricants du monde entier qu'une entente de principe était intervenue entre la STM et le consortium Bombardier-Alstom, selon des termes différents  de ceux qui avaient été prévus dans un premier appel d'offres international lancé en 2009.

L'avis mentionnait, notamment, que l'appel d'offres initial, prévoyant la livraison d'environ 340 voitures neuves, avait changé en cours de route  pour se transformer en une commande ferme de 765 voitures en plus d'options pour 288 autres voitures, en prévision d'un éventuel prolongement du réseau du métro. CAF a alors fait connaître son intérêt, en plus de fournir des documents démontrant qu'il pourrait remplir les conditions prévues au contrat.

Dans sa requête judiciaire de 30 pages, le consortium Bombardier-Alstom estime que la STM a erré dans son évaluation des capacités financières et techniques de la firme CAF à répondre aux conditions précises du contrat en matière de contenu canadien, ainsi qu'aux exigences techniques pour la fabrication et la livraison de ces voitures.

Le consortium reproche principalement à la STM d'avoir fondé son évaluation de la candidature de CAF sur des informations qui n'ont jamais été rendues publiques et sur un rapport d'un consultant, dont les analyses demeurent, à ce jour, secrètes.

Bombardier-Alstom conteste enfin les «fondements factuels» qui ont convaincu la STM à lancer un nouvel appel d'offres à partir des informations fournies par le fabricant espagnol «qui n'a manifestement pas les capacités requises» pour remplir une commande d'au moins 765 voitures, ni «la disponibilité d'un réseau de fournisseurs locaux», pour se conformer à l'exigence de produire des voitures comportant 60% de contenu canadien.

Dans sa requête, le consortium affirme notamment que l'expertise de ce fabricant, pour la production de voitures de métro roulant sur des pneumatiques, se limite aux deux contrats convenus pour des commandes relativement récentes pour les métros de Mexico et Santiago.

«C'est Bombardier, affirme la requête, et non CAF, qui avait la responsabilité de concevoir, de faire le design, de fabriquer et de fournir l'ensemble composé du bogie sur pneumatiques, de la propulsion et du freinage, ainsi que la majorité des systèmes et des composantes principaux et critiques incorporées aux voitures du métro. L'expérience  de CAF dans le Contrat Mexico ne peut par conséquent être qualifiée de significative, ni de pertinente, aux fins de la fabrication de voitures», telles que requises par la STM.

Quant au contrat de Santiago, au Chili, «il porte sur seulement 144 voitures, avec une option pour 36 voitures additionnelles», et les premières voitures fabriquées pour ce contrat ne roulent que depuis neuf mois.

De plus, la société CAF, qui n'a pas d'usine au Canada, «n'a jamais été appelée à satisfaire à des exigences de contenu canadien», affirme le consortium.

Enfin, plaide la requête, les projets exécutés par CAF à Sacramento, Pittsburgh et Washington, qui sont assujettis au Buy America Act, «ne peuvent être comparés au projet de remplacement des voitures du métro de Montréal» parce que les commandes prévoient seulement 16, 28 et 192 voitures, respectivement. Celle de la STM pourrait dépasser 1000 voitures, en comptant les options.

En conséquence, Bombardier et Alstom demandent à la Cour supérieure d'annuler la décision du conseil d'administration de la STM de procéder à un nouvel appel d'offres international, qui pourrait être publié d'ici l'hiver prochain.

La STM a décliné hier l'invitation de La Presse à commenter les allégations faites par le consortium dans sa requête introductive d'instance en nullité.