Les citoyens et commerçants du centre-ville pourront continuer à balayer le devant de leur propriété de plein droit. Dans un jugement rendu hier, la Cour d'appel a rejeté la requête du puissant syndicat des cols bleus de Montréal afin d'invalider une portion du Règlement sur le civisme, le respect et la propreté de l'arrondissement de Ville-Marie.

Dans cette portion du règlement, remodelé en 2007 afin de lui donner plus de mordant, il est prévu d'obliger les citoyens à nettoyer le domaine public devant chez eux, à savoir le trottoir, la bordure et les premiers 60 cm de la chaussée. Sous peine d'amendes.

Dans sa poursuite, rejetée par la Cour supérieure en juin dernier, le syndicat des cols bleus demandait à la cour d'ordonner à la Ville de Montréal de faire exécuter ces travaux «exclusivement par des employés cols bleus», membres du local 301. Essentiellement, la cause des cols bleus s'appuyait sur un article de leur convention qui empêche l'administration municipale d'employer des bénévoles ou des organismes à but non lucratif pour accomplir une tâche relevant de leurs descriptions de tâches.

Après avoir épluché le jugement rendu en juin dernier, le juge de la Cour d'appel, André Rochon, approuve la dernière décision rendue. Selon lui, des citoyens contraints par règlement de nettoyer le devant de leur propriété sous peine d'amendes ne peuvent pas être considérés comme «des bénévoles». Avec une preuve adéquate, ajoute-t-il cependant, des «questions de principe» peuvent «émerger et commander» d'être soumises devant les tribunaux, conclut-il.

Informé de la teneur du jugement par La Presse, le maire de Ville-Marie, Benoit Labonté, a expliqué hier après-midi que le jugement est la preuve que le règlement n'a pas été rédigé sur «un bout de serviette de table, mais plutôt avec sérieux», avec la collaboration d'avocats spécialisés dans le domaine.

«Cette portion du règlement était l'une des clés de nos objectifs de propreté et de civisme, soit celle de mettre à contribution les citoyens. On maintient en vigueur notre règlement», a ajouté M. Labonté, candidat aux prochaines élections sous la bannière de Vision Montréal, dont la chef est Louise Harel.

Lors de la première année de son entrée en vigueur, en 2007, 2018 constats d'infraction ont été remis pour non-respect du règlement. En 2008, le nombre est passé à 1741 constats. Puis, pour les huit premiers mois de 2009, à 497 constats. Mais le plus grand nombre de constats remis cette année (445) concerne les gens qui ne respectent pas les heures de dépôt de leur contenant de recyclage sur le bord du chemin.

Selon Jacques-Alain Lavallée, directeur des affaires publiques dans Ville-Marie, il faut voir dans cette diminution des constats un signe de l'efficacité du règlement sur la propreté, avec une clause sur le civisme.  «On a moins de récidives, dit-il. Le message est en train de passer. Il y a par ailleurs davantage de cendriers et de poubelles dans Ville-Marie. Mais il demeure que l'on ramasse encore trop de mégots et de gommes à mâcher sur le domaine public. On prévoit donc d'autres blitz d'inspections.»

Chaque année, l'arrondissement du centre-ville consacre 30 millions de son budget, y compris les salaires des cols bleus, dans les opérations de propreté et de collecte d'ordures. Au total, 13 inspecteurs sont déployés sur le territoire pour faire respecter les différents règlements.

«C'est un travail de longue haleine, ajoute M. Labonté, maire de Ville-Marie. Le message passe auprès des citoyens, on voit les résultats, mais il ne faut pas relâcher nos efforts.»

Au bureau du Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal, où le bureau syndical était en réunion à huis clos hier après-midi, Michel Parent, le président, n'a pas commenté le jugement. «On va le lire», a dit son attaché de presse, Benoit Vachon.