Une bataille juridique féroce se joue autour de la réfection de l'hôtel de ville, déjà au centre d'une enquête de la Sûreté du Québec pour des allégations de corruption. L'administration du maire Tremblay a retiré le contrat de 11 millions à l'entreprise LM Sauvé pour le confier à l'entrepreneur Asys Réalisations, filiale de L'Unique assurances générales, compagnie de caution désignée dans le contrat de rénovation.

Mécontent de la tournure des événements, LM Sauvé, qui a déjà invoqué l'insolvabilité, a la ferme intention d'entamer des poursuites contre la Ville de Montréal, a affirmé son président, Paul Sauvé, lors d'un entretien avec La Presse. Et selon nos sources, des huissiers s'apprêtent à débarquer sur le chantier afin de tenter de récupérer les échafaudages qui ceignent l'édifice historique, ce qui aura pour conséquence de ralentir de nouveau les travaux.

 

Au printemps dernier, le cabinet du maire de Montréal avait alerté la police de Montréal quand Paul Sauvé a affirmé qu'un membre d'une famille connue de la mafia lui avait demandé 40 000$, somme selon lui destinée à deux élus de la garde rapprochée du parti de Gérald Tremblay. Durant le mois de mai et au début de juin, les travaux à la partie nord de l'hôtel de ville ont pratiquement été paralysés jusqu'à ce qu'ils reprennent à plein régime, fin juillet, sous la direction d'Asys Réalisations.

«La Ville n'avait pas à invoquer la loi sur le cautionnement parce que, lorsque nous avons quitté le chantier il y avait un surplus de trésorerie de l'ordre de 1 million, c'est-à-dire que notre chantier était rentable», estime Paul Sauvé.

«C'est certain qu'on va intenter des poursuites contre la Ville, ajoute-t-il. Elle avait juste à nous laisser finir les travaux, comme le font les entreprises de Winnipeg, Toronto et Vancouver. Montréal nous enlève une partie des profits projetés pour restructurer mon entreprise comme le prévoit la loi fédérale.»

Enquête toujours en cours

À la Ville de Montréal, le porte-parole du comité exécutif, Darren Decker, a signifié à La Presse, hier après-midi, que les élus de l'administration municipale n'avaient «absolument aucun commentaire à formuler.» «Le dossier fait l'objet d'une enquête», a-t-il ajouté.

Gilles Vallières, responsable du dossier à L'Unique assurances générales, n'a pas rappelé La Presse. À la Sûreté du Québec, on a confirmé que l'enquête est toujours en cours sans être en mesure de fournir de l'information sur les démarches actuelles.

De son côté, une responsable des communications de la Ville de Montréal, Lucie-Anne Fabien, n'a pas été en mesure d'indiquer quand il était prévu d'achever les travaux, les coûts engendrés jusqu'à maintenant et le détail des prochaines étapes. «Les travaux n'ont jamais cessé complètement», a-t-elle cependant tenu à dire.

La semaine dernière, les élus du comité exécutif ont approuvé une enveloppe supplémentaire de 8000$, à même le budget de l'agglomération, pour de l'équipement et des appareils d'éclairage architectural extérieur. Cette partie du contrat, confiée aux firmes Wesco Distribution et HD Supply Canada, est estimée à 1,2 million et consiste à installer des projecteurs sur mesure.

Quant à l'ensemble des travaux de restauration, l'administration du maire Tremblay les estime toujours à environ 13,3 millions. Cette facture risque cependant de gonfler avec l'attribution prochaine d'un contrat pour refaire toute la fenestration, infiltrée par l'eau. Sans compter les frais engagés pour les services de trois firmes d'architectes.