La suspension de la pose des sabots de Denver coûtera 1 million à la Ville de Montréal, préviennent les huissiers de justice qui sont touchés par la décision. Ils estiment que l'administration municipale a tout faux lorsqu'elle affirme que la mesure permettra d'économiser 350 000$.

Au début du mois, les autorités ont suspendu l'utilisation de ces entraves, qui immobilisent les voitures de contribuables qui ne paient pas leurs contraventions. La cour municipale, qui embauchait les huissiers pour ce service, avait dû sabrer son budget de 1,5 million dans la foulée des compressions annoncées fin février par l'administration Tremblay.

 

La mesure - temporaire, précise la Ville - vise à réduire les dépenses liées aux honoraires professionnels. Les autorités estiment qu'elle permettra d'économiser 350 000$, un chiffre contesté par les huissiers.

«Selon nos calculs, le manque à gagner annuel de la Ville de Montréal qui est directement lié à la suspension de l'opération sabot sera de plus d'un million de dollars», affirme Luc Valade, de Valade et Associés, huissiers de justice.

Jusqu'à l'abolition du programme, les contrevenants devaient payer l'huissier qui avait posé un sabot de Denver en plus de leurs amendes. Dans environ 10% des cas, ils étaient considérés comme insolvables et la cour municipale devait acquitter les honoraires des huissiers.

Luc Valade a compilé les statistiques des cinq autres entreprises qui posaient des sabots pour le compte de la Ville et calculé les sommes qu'elles rapportaient dans les coffres de la municipalité. Résultat: la cour municipale a déboursé 120 000$ en 2008 pour un service qui lui rapportait six fois plus en amendes perçues.

Et les retombées sont encore plus élevées, estime M. Valade. Car plusieurs contrevenants qui sont contraints de payer leurs contraventions à cause d'un sabot de Denver en profitent pour rembourser d'autres sommes en souffrance à la Ville. Voilà pourquoi les huissiers estiment rapporter 1 million par année à la municipalité.

La porte-parole de la Ville, Valérie De Gagné, n'a pas confirmé les chiffres avancés par les huissiers, hier. La cour municipale estime que les huissiers ont saisi un total de 2,1 millions auprès de mauvais payeurs l'an dernier. Mais on ignore combien rapportent les sabots de Denver.

«Il n'y a pas de perte pour la Ville parce que les sommes vont être perçues autrement, notamment par la suspension des permis de conduire, explique Mme De Gagné. Ce n'est pas parce qu'on suspend temporairement la pose des sabots de Denver que les dossiers des contrevenants sont fermés.»

Depuis que la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ) révoque les permis des contrevenants, le recours au sabot de Denver a constamment diminué à Montréal. La Ville avait fait immobiliser 5342 véhicules par ce moyen en 2004. L'an dernier, en 2008, le chiffre avait fondu à 2487.