Faut-il réduire le nombre d'arrondissements et d'élus à Montréal par souci d'économie? L'idée, avancée par le conseiller municipal Cosmo Maciocia, a été rejetée hier par le maire Gérald Tremblay. Elle mérite pourtant réflexion, disent plusieurs politiciens, dont l'ex-ministre Louise Harel.

La proposition du conseiller municipal Cosmo Maciocia de supprimer la moitié des arrondissements de Montréal pour des raisons d'efficacité et d'économie n'a pas soulevé de levée de boucliers, hier. Si le maire Gérald Tremblay la juge inopportune, elle ouvre la porte à une réflexion sur la gouvernance de la métropole, selon l'ex-ministre Louise Harel et le chef de l'opposition, Benoit Labonté.

 

Le maire Tremblay n'était pas au courant de la proposition de son lieutenant livrée dans La Presse, hier. «Je l'ai lue à 4h30, ce matin», a dit le maire, qui l'a immédiatement rejetée. M. Tremblay n'est pas opposé à l'évolution de la structure de la Ville, mais avec la crise actuelle, il préfère «tout faire ce qu'il est possible de faire» pour améliorer l'efficacité du modèle actuel.

«À court terme, il faut maintenir une certaine stabilité et surtout ne pas créer d'incertitude, dit-il. Il y a moyen de revoir les services et les équipements qui sont la propriété des différents arrondissements et d'optimiser les meilleures pratiques possible pour améliorer les services aux citoyens.»

Il ajoute que changer les limites d'un arrondissement nécessite une résolution du conseil de l'arrondissement, une décision du conseil municipal et l'accord de l'Assemblée nationale du Québec. Il estime que la période fusions-défusions a été assez pénible pour ne pas en rajouter. D'autant plus qu'il croit que le changement de structure n'est pas si avantageux.

«Combien va-t-on sauver? a-t-il demandé. Dix millions? Mais c'est 155 millions (de compressions) que ça nous prend! Et on ne changera pas la structure en une nuit. Ça peut prendre un ou deux ans.»

Sur l'idée de faire passer le nombre d'élus de 105 à 51, il a dit que les villes défusionnées de l'île ont 113 élus pour 15 villes représentant 200 000 habitants. «Pour changer cette situation, ça prend une décision du gouvernement du Québec et elle devra s'appliquer partout», a-t-il prévenu.

Mais Louise Harel, ex-ministre des Affaires municipales et de la Métropole au moment des fusions en 2001, a trouvé la proposition de M. Maciocia fort intéressante. Elle affirme qu'il faut «revoir les délimitations territoriales» mais elle ajoute aussitôt que «ce ne sera pas suffisant».

«Ce qu'il faut revoir, c'est la gouvernance, dit-elle. Il faut optimiser l'efficacité administrative.» Si elle le pouvait, elle ferait disparaître l'élection des maires d'arrondissements au suffrage universel et, pourquoi pas, ramènerait le nombre d'élus de 105 à 51, mais seulement «si l'on ne crée pas une fédération d'arrondissements, soit une ville à plusieurs vitesses». «Il ne faut pas consolider des royaumes», dit-elle.

»Monstre à 19 têtes»

Le chef de l'opposition, Benoit Labonté, candidat de Vision Montréal à la mairie, a trouvé «amusant» que la proposition émane d'un membre du comité exécutif «alors que je dis depuis longtemps que la Ville est un monstre à 19 têtes ingouvernable».

«Je pense que le principe mérite d'être étudié, a-t-il ajouté. Mais le modèle actuel a été entériné par l'administration Tremblay. Il ne faudrait pas que ce soit aussi improvisé. Il faut que les changements se fassent correctement en rapatriant des pouvoirs à la ville centre. Les arrondissements doivent être limités aux réels services de proximité. Les citoyens ne veulent pas un brassage de structures, mais une ville efficace et qui leur donne des services de qualité.»

Pour le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, la sortie de Cosmo Maciocia est «un ballon d'essai». «C'est téléguidé, dit-il. Mais ceux qui l'ont envoyé en mission se trompent d'époque. Ça fait 30 ans qu'on attaque le secteur public pour le rapetisser le plus possible. Pourtant, on est en train d'en sortir de ça. Et puis, c'est facile de dire aujourd'hui que L'Île-Bizard est petite. Il fallait le dire il y a cinq ans quand il y a eu les défusions. Nous, en tout cas, on abolirait les mairies d'arrondissements.»

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