Aux prises avec des difficultés de financement, le gigantesque projet immobilier Griffintown, évalué à 1,3 milliard, est révisé. Il sera finalement réalisé par étapes, ont reconnu hier la Ville et le promoteur, avec une première phase de quelque 300 millions devant voir le jour en 2010.

«En pratique, ça met fin au projet de Griffintown comme on le connaissait», estime le maire de Ville-Marie, Benoit Labonté. C'est lui qui, le premier hier, a tiré la sonnette d'alarme quand il a appris que le comité exécutif de Montréal se pencherait aujourd'hui sur deux aspects cruciaux du projet Griffintown. On s'attend à ce que l'administration Tremblay abroge les réserves foncières et mette fin aux décrets d'expropriations.

 

«À partir du moment où on fait ces deux gestes, on n'a plus du tout le même projet, dit M. Labonté. Si, et je dis bien si, il y a un autre projet l'année prochaine, il va se faire sur quel terrain? Ou bien c'est un projet de plus petite ampleur, et il va devoir se faire sur un autre terrain qui appartient déjà à Devimco, ou ça va être un projet éclaté.»

Le maire de Ville-Marie estime que Gérald Tremblay a raté une autre occasion de démontrer du leadership. «Pourquoi le maire de Montréal n'a pas pris son bâton de pèlerin et n'est pas parti avec le promoteur sur les marchés financiers internationaux pour parler des avantages de développer économiquement à Montréal? Peut-être que les banquiers auraient choisi le projet de Devimco plutôt qu'un autre ailleurs.»

À la Ville de Montréal, on assure que le projet Griffintown est loin d'être mort, même si on reconnaît que le contexte économique force le promoteur à la prudence. «Le projet aura la même ampleur, mais il ne sera pas fait en une seule phase comme on le prévoyait, affirme Luis Miranda, responsable du développement économique au comité exécutif. Nous ne mettons pas la clé dans la porte, nous ne voulons pas lancer la serviette. Nous continuons avec le même plan. La seule chose, c'est qu'il va y aller par étapes.»

Première phase

Pourquoi abandonner l'expropriation, dans ce cas? Selon M. Miranda, Montréal ne peut techniquement renouveler plus d'une fois l'avis d'expropriation, d'une durée de deux ans. «Il faut être responsable. Tu expropries, tu dois être prêt à développer.»

Même son de cloche chez Devimco, où on assure de vive voix que tout se déroule selon les plans initiaux. «On devait commencer par une première phase de 400 millions, dit André Bouthiller, porte-parole. Dès 2010, on va faire une première phase de 30% de 1,3 milliard... Faites le calcul. C'est un projet alternatif, mais pas modeste. Trouvez-moi des entreprises du secteur privé qui annoncent des projets de cette envergure-là à Montréal pour 2010, il n'y en a pas beaucoup.»

Cette première phase, explique l'entreprise par communiqué, se concentrera sur la partie sud du territoire dont une majeure partie appartient à Devimco. Ce projet «révisé» - le mot est dans le communiqué - occupera une superficie de 30% du périmètre original et comprendra plus d'habitations et moins de commerces et d'espaces de bureaux que prévu.

Devimco promet que tous les détails de ce «nouveau scénario» seront dévoilés vers la fin 2009. «M. Labonté peut faire de la politique s'il le veut, nous on fait des projets. Et on veut le réaliser», renchérit M. Bouthiller.