Les clients éventuels d'Énergie Est souhaitent toujours exporter du pétrole depuis un port au Québec et le promoteur, TransCanada, n'écarte pas la possibilité de revenir à la charge avec une nouvelle demande en ce sens.

La question a été soulevée par le porte-parole d'Équiterre, Steven Guilbeault, devant le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE), jeudi à Lévis.

M. Guilbeault a reproché à TransCanada de « dire une chose et son contraire » en affirmant ne plus vouloir exporter depuis le Québec alors que les documents déposés par la pétrolière devant le BAPE font toujours état des 270 000 barils de pétrole par jour que les producteurs prévoyaient exporter à partir d'un terminal maritime à Cacouna dans le projet initial.

« Des pourparlers avec les expéditeurs touchés se poursuivent relativement au traitement de ces volumes », a dit M. Guilbeault, citant les documents déposés par TransCanada en décembre dernier où les

Le vice-président d'Énergie Est pour le Québec et le Nouveau-Brunswick, Louis Bergeron, a reconnu que les éventuels clients du pipeline n'avaient pas renoncé à l'idée.

« Effectivement, il y a un désir de la part des producteurs d'avoir accès à un port pétrolier au Québec », a-t-il déclaré, tout en rappelant à plus d'une reprise que « le projet Énergie Est tel qu'il est actuellement et qu'il a été soumis à l'Office national de l'Énergie avec l'amendement du mois de décembre dernier, ne comprend pas de port au Québec. »

Cependant, il n'a pas écarté la possibilité de revenir à la charge dans l'avenir, précisant qu'il faudrait alors traverser à nouveau le processus réglementaire.

« Si un jour, dans 5 ans, 10 ans, 15 ans, il y a un site qui est identifié et les expéditeurs désirent qu'on poursuive à ce moment-là un projet pour avoir un port au Québec, nous devrons faire une nouvelle application à l'Office national de l'énergie », a dit M. Bergeron.

Par ailleurs, bien que TransCanada invoque la confidentialité pour ne pas dévoiler les détails sur les ententes de transport de pétrole avec ses clients, l'entreprise a tout de même confirmé que l'entente conclue en 2013 avec le gouvernement conservateur de l'Alberta pour le transport de 100 000 barils de pétrole par jour via l'oléoduc Énergie Est était toujours en vigueur malgré le changement de gouvernement.

Québec ne peut rien évaluer

Dans un autre volet, la représentante du ministère de l'Environnement du Québec, André-Anne Gagnon, est revenue sur les impacts et les coûts d'un déversement d'hydrocarbures à la rivière Etchemin, ce qui représente le pire scénario de catastrophe envisageable, selon TransCanada.

Mme Gagnon a indiqué que son ministère n'était pas en mesure de confirmer ni les coûts, ni les impacts, ni même la gravité d'un tel déversement.

« Vu que (le promoteur) n'a pas déposé d'avis de projet ni d'étude d'impact, le scénario de déversement de la rivière Etchemin n'a pu être évalué », a-t-elle indiqué.

« Nous ne sommes même pas en mesure de dire si le déversement de la rivière Etchemin est exactement le pire scénario selon le critère d'évaluation du ministère de l'Environnement. »

Elle a ajouté que l'évaluation des coûts de 619 millions de TransCanada ne pouvait donc être contre-vérifiée, pas plus qu'on ne pouvait confirmer si la provision de 30% qu'elle comprend pour pallier les imprévus était assez conservatrice ou non.

« Le ministère n'a pas de position sur le conservatisme du 30% de contingence ou de l'évaluation de coûts », a déclaré Mme Gagnon.

Elle a de plus indiqué que des discussions étaient en cours pour tenir des consultations auprès des communautés autochtones, une procédure qui aurait été automatique si un avis de projet avait été déposé à Québec, mais que le dossier était loin d'être réglé.

Le président de la commission du BAPE, Joseph Zayed, a d'ailleurs avoué qu'il y avait « des facteurs limitants » au travail du BAPE, faisant référence à l'absence d'évaluation environnementale complète et de consultation autochtone.

Le mandat du BAPE est limité à un survol général en vertu de l'article 6.3 de la Loi sur la qualité de l'environnement plutôt qu'au processus en profondeur prévu à l'article 31.1, qui s'applique lors d'un dépôt de projet.

Québec demande à la Cour supérieure d'ordonner à TransCanada de déposer un avis de projet, alors que la firme soutient que son projet est de juridiction fédérale et n'est soumis qu'à l'approbation de l'Office national de l'énergie.