La déclaration du chef libéral Philippe Couillard évoquant la possibilité de nourrir une famille de trois personnes avec 75 $ par semaine aura certes eu le mérite de provoquer un débat sur le budget pour s'alimenter, mais les questions de pauvreté ont été trop peu abordées durant la campagne électorale et, surtout, pas de manière globale, avec des solutions à l'appui.

Plusieurs groupes communautaires qui travaillent dans la lutte contre la pauvreté et l'itinérance ont dénoncé, lundi au cours d'une conférence de presse à Montréal, le peu de cas qui a été fait de ces questions durant la campagne électorale.

N'eut été de ce qu'ils ont appelé la « gaffe » du premier ministre sortant sur l'épicerie à 75 $ par semaine pour trois personnes, la question de la pauvreté et de ses conséquences aurait été peu abordée, ont dénoncé ces groupes.

« Quand on est un ménage qui doit payer la moitié ou plus de son revenu pour se loger, inévitablement on doit couper ailleurs. On coupe sur la nourriture, sur les médicaments parfois, sur le transport en commun. La gestion de la pauvreté prend énormément de temps pour les ménages à faible revenu », a illustré Émilie E. Joly, organisatrice communautaire au FRAPRU (Front d'action populaire en réaménagement urbain).

Il faut des mesures mieux articulées, et non à la pièce, ont-ils plaidé. Les mesures doivent donc toucher le logement social, les aînés, les personnes handicapées, l'aide sociale, l'accès aux soins de santé, l'itinérance, la prévention, la judiciarisation, entre autres.

« Oui, des fois il y a des annonces intéressantes, comme celle du revenu de base - quoiqu'on pourrait avoir bien des critiques par rapport à ce projet-là - mais on ne s'occupe pas du reste. La question du salaire minimum, par exemple, c'est un autre bout de la lorgnette, où on devrait avoir des engagements. On dit qu'on veut aider les personnes handicapées, mais combien on a coupé dans les services publics au niveau de la santé ! Dans le fond, c'est comme si on était un peu bipolaire lorsqu'on dépose des plans de lutte » contre la pauvreté, a dénoncé Serge Petitclerc, porte-parole du Collectif pour un Québec sans pauvreté.

Des ressources débordées

Et ces groupes réitèrent leur demande d'être mieux financés, puisqu'ils peinent à répondre à la demande et que leurs travailleurs sont surchargés.

« On arrive avec des équipes qui deviennent aussi vulnérables, des travailleurs aussi fragilisés que les gens avec lesquels ils travaillent », a rapporté Johanne Cooper, présidente du Regroupement des auberges du coeur du Québec.

« Les ressources sont pleines. On l'a vu encore récemment à Québec, où les refuges débordaient. On l'a vu au cours de la dernière année à Montréal, où les refuges et les hébergements d'urgence ne débordaient pas systématiquement, mais ils ont présenté un achalandage très élevé toute l'année », a rapporté Mathieu Frappier, coordonnateur du Réseau solidarité itinérance du Québec.