Philippe Couillard s'engage à freiner la spéculation en limitant l'achat de terres agricoles par des fonds d'investissement à 100 hectares par année, l'équivalent des Plaines d'Abraham à Québec. Une promesse qui se veut aussi une flèche décochée à l'endroit de la Coalition avenir Québec (CAQ).

Le chef libéral a voulu faire d'une pierre deux coups devant le conseil général de l'Union des producteurs agricoles (UPA) jeudi. Avec son engagement attendu par le syndicat des agriculteurs, il cible le modèle d'affaires de Pangea, une société créée en 2012 par le cofondateur de la CAQ, Charles Sirois.

La Caisse de dépôt et placement a investi dans cette société en 2017, et son vice-président à l'époque, Christian Dubé, aujourd'hui candidat-vedette de la CAQ, avait défendu cette décision dénoncée par l'UPA.

Pangea achète des terres agricoles et s'associe à des producteurs pour les exploiter. Cette société détient plus de 6000 hectares. Elle est le deuxième plus grand propriétaire de terres agricoles et son plan d'expansion devrait l'amener à occuper rapidement la première place, relevait-on le printemps dernier.

L'UPA accuse Pangea de faire grimper le prix des terres et de les rendre inaccessibles à la relève.

Le ministre de l'Agriculture Laurent Lessard avait commandé à ses fonctionnaires une analyse sur le modèle d'affaires de Pangea, un document produit en collaboration avec la Financière agricole et rendu public le printemps dernier.

« Il est impossible de confirmer, à l'aide des informations que le MAPAQ a en sa possession, que cette hausse du prix des terres agricoles est influencée par Pangea », peut-on lire dans cette analyse.

« Le Ministère estime que ce modèle d'affaires peut être intéressant pour les parties prenantes sur un nombre limité de terres, situées dans certaines régions où la valeur des terres est relativement faible, et pour des cultures particulières qui permettent de générer des économies d'échelle. Si l'on considère ces facteurs structurels, l'importance relative de ce modèle au Québec devrait demeurer limitée. » 

L'analyse note que « certains acteurs ont souligné que la présence de Pangea pourrait être vue de manière plus positive si celle-ci concentrait ses acquisitions sur des terres sous-exploitées ».

Après la publication de cette analyse, Laurent Lessard se disait « préoccupé » par le modèle d'affaires de Pangea et avait demandé une étude plus approfondie.

« Nous ne souhaitons pas le développement d'une agriculture de locataires », disait-il par voie de communiqué le 26 avril dernier.

Devant le conseil général de l'UPAC, Philippe Couillard a promis de « préserver le modèle de fermes familiales » et à « assurer son développement ».

En plus de limiter l'achat de terres agricoles par des fonds d'investissement, le chef libéral veut « maximiser l'admissibilité de la relève agricole aux fonds gouvernementaux grâce à une révision de l'ensemble de ces fonds ».

S'il est réélu, il compte « moderniser la Loi sur la protection des territoires et des activités agricoles pour la rendre plus simple et plus efficace ».

Il créerait un nouveau programme de crédit de taxes foncières agricoles dans la première année d'un prochain mandat. La réforme pilotée par l'ex-ministre Pierre Paradis avait provoqué la colère de l'UPA et avait été annulée par son successeur Laurent Lessard l'an dernier. D'ici la mise en oeuvre du nouveau programme, un gouvernement libéral verserait 20 millions de plus par année à titre de compensation aux agriculteurs. Le programme actuel coûte 150 millions annuellement.

M. Couillard s'engage également à réviser les programmes de la Financière agricole afin de « prendre mieux en considération les intempéries naturelles ».

Il a réitéré son appui à la gestion de l'offre dans le cadre de la renégociation de l'ALENA avec les États-Unis.