C'était l'heure de vérité pour les sondeurs lundi soir. Au terme d'une campagne difficile qui a rendu les prédictions particulièrement hasardeuses, leur performance a finalement été plutôt bonne, selon Claire Durand, professeure de sociologie à l'Université de Montréal et grande spécialiste des sondages.

S'ils ont été beaucoup critiqués et si leur bien-fondé a été beaucoup remis en doute quand ils ont fait leur apparition, les sondages effectués sur le web, au Québec « offrent une image aussi bonne que les sondages téléphoniques », relève Mme Durand.

Certes, l'appui au Parti libéral a finalement été légèrement sous-estimé, mais « on est dans la marge d'erreur. Les sondages ne peuvent jamais arriver pile-poil ».

Pour Québec solidaire, la soirée a été moins heureuse que prévu. Mme Durand ne s'en étonne pas outre mesure. Les sondeurs, à son avis, n'auraient pas dû inclure ce parti dans la répartition des indécis. « Mettons que les partisans de Québec solidaire ont plus tendance à s'affirmer qu'à être indécis ! »

Qui a fait la différence de façon générale ? Manifestement, les anglophones et les allophones, répond Mme Durand.

« Habituellement, les non-francophones vont moins voter aux élections provinciales que les francophones. Cette fois-ci, si je doute qu'ils se soient autant mobilisés qu'au référendum de 1995 comme l'ont avancé certains analystes, il est sûr qu'on a donné aux non-francophones des thèmes qui les ont fortement mobilisés. »

Si cette mobilisation était prévisible, il reste que cette campagne a particulièrement donné du fil à retordre aux sondeurs, note pour sa part Youri Rivest, vice-président chez Crop.

« Cela a été beaucoup plus difficile que celle de 2012, admet-il. En 2012, il y a bien eu quelques mouvements en début de campagne, mais ça s'est stabilisé. Cette fois, divers thèmes successifs ont été abordés, amenant des déplacements de l'électorat pendant la campagne. Un sondage, ça reste une photo et quand ça bouge beaucoup, l'image risque nécessairement d'être plus imprécise. »

Claire Durand a d'ailleurs observé que certaines firmes de sondage, qui font habituellement leurs collectes de résultats en quatre ou cinq jours, le faisaient cette fois dans certains cas en deux jours, « peut-être par peur que les intentions de vote changent avant que le travail de terrain soit fait ».