Grosse journée en santé mardi. Le Parti libéral du Québec et Québec solidaire ont mis sur la table plusieurs engagements pour améliorer les soins en première ligne. Est-ce réaliste? Voici la réponse de deux experts consultés par La Presse.

Parti libéral du Québec

>Promesse: Embauche de 2000 infirmières praticiennes en 10 ans et création de 50 «super-cliniques» ouvertes en tout temps.

Régis Blais professeur titulaire en administration de la santé à l'Université de Montréal

«C'est un souhait louable, mais encore faut-il que les ressources soient au rendez-vous pour former les infirmières praticiennes et les engager par la suite», lance-t-il. Les universités devront être financées de façon à pouvoir accueillir et former ces futures infirmières et il devra y avoir des postes pour elles par la suite. «Deux mille infirmières praticiennes en 10 ans, c'est 200 par année, ce n'est pas énorme. Mais dans le domaine de la santé, plus l'horizon est long, et plus on risque de se tromper. En 10 ans, il se passe bien des choses. Si on disait 200 en un an, on aurait une obligation de résultat. Dix ans, c'est long...»

Lise Denis ex-directrice générale de l'Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux (AQESSS) et conseillère spéciale chez Tact

«C'est bien, mais ce n'est probablement pas suffisant», lance Mme Denis en soulignant que l'Ontario en a déjà plus de 2000. «Au Québec, on a pris du retard et ça ne me semble pas assez ambitieux pour faire la différence». Il faudra aussi augmenter la capacité de formation et s'assurer que les cliniques et les établissements de santé demanderont d'avoir des infirmières praticiennes dans leurs rangs. «Il faut vraiment que ce soit un "team" avec le médecin», précise Mme Denis.

En chiffres

Les infirmières praticiennes au Québec : L'infirmière praticienne est autonome. Elle peut prescrire des tests diagnostiques et des traitements et pratiquer certaines interventions. Elle a cinq ans d'études (baccalauréat en soins infirmiers, maîtrise et diplôme d'études spécialisées en sciences médiales) et deux ans d'expérience comme infirmière.

> On en compte 235, dont 174 en soins de première ligne

> 197 en devenir (34 candidates à l'examen et 167 en formation)

> Salaire: de 50 300 à 92 800$

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Québec solidaire

>Promesse: Ouvrir les CLSC 24 heures par jour, 7 jours sur 7 et embaucher 800 professionnels de soins - dont des infirmières praticiennes - d'ici cinq ans pour y travailler.

«Si les gens avaient un médecin de famille, ce serait déjà pas mal. On n'aurait pas besoin d'ouvrir des CLSC plus longtemps. Ce n'est pas une mauvaise idée, mais ça prend de l'équipement. Les gens ont besoin d'avoir accès à des plateaux techniques, des examens de laboratoire et des radiographies, que ce soit dans les CLSC, les groupes de médecine familiale (GMF) ou les cliniques-réseau. Ces dernières sont déjà censées le faire. Peut-être qu'on pourrait plutôt étendre les heures d'ouverture de ces cliniques», dit Régis Blais.

«On n'en est plus là», lance-t-elle en soulignant qu'il faudrait fermer des cliniques pour rapatrier des médecins dans les CLSC. «Notre système de santé a évolué vers un réseau local et non pas juste autour des CLSC. Il est important de faire travailler ensemble les professionnels des CLSC et les professionnels des cliniques médicales et des groupes de médecine de famille. Il y a déjà beaucoup d'ententes qui existent. On est mieux de continuer dans cette voie que d'essayer de ramener tout le monde dans les CLSC», dit Lise Denis.

En chiffres

> 140 CLSC répartis dans 93 centres de santé et de services sociaux

> 256 groupes de médecine de famille actuellement

> Environ 1 Québécois sur 4 n'a pas de médecin de famille.