La tournée électorale de Philippe Couillard prend des airs de campagne référendaire. Le chef libéral brandit la valeur de la citoyenneté canadienne « enviée du monde entier » et sort l'artillerie lourde contre le Parti québécois qui veut « détruire le Canada ».

Il évoque même les périls qui guettent le Québec en raison des sorties de l'équipe de Pauline Marois pour la relance du débat référendaire. «Chaque fois que [le Parti québécois] s'agite comme actuellement pour faire entrevoir un référendum, le Québec en sort affaibli », a soutenu le chef libéral mardi, en conférence de presse à Trois-Rivières.

Il s'est donné pour mission de « déchirer le rideau » que tire le Parti québécois sur son option. « Ceux qui pensent qu'on va séparer le Québec du Canada sans rien détruire sont dans un monde d'illusion. Le Parti québécois depuis des années, et j'en ai ras le bol, garde les Québécois dans un monde de fantaisie imaginaire, un monde d'illusion qui n'a absolument rien à voir avec la réalité. Moi, je brise le rideau, je déchire le rideau ! C'est fini l'illusion, le monde imaginaire, on va parler de la réalité, des vraies affaires », a-t-il lancé.

C'est ainsi que le chef libéral a dénoncé les « euphémismes » du lexique souverainiste. « Quelqu'un qui veut séparer le Québec du Canada, ça s'appelle un séparatiste en français. Quelqu'un qui veut séparer le Québec du Canada, c'est quelqu'un qui veut détruire le pays qui est le Canada. Ce n'est pas autre chose que la vérité », a-t-il soutenu.

Il a indiqué que plusieurs candidats du Parti québécois, en particulier Pierre Karl Péladeau, ont déclaré qu'ils font le saut en politique surtout pour réaliser la souveraineté. « Ça met la chose visible sur la table » selon lui, surtout après les déclarations ambiguës de Pauline Marois en début de campagne. « Le Parti québécois, c'est juste ça qu'ils veulent. C'est l'article 1 de leur programme. Alors ils endorment la population : « vous savez, on va être un bon gouvernement, on va administrer, et on verra un jour, on fera un livre blanc ». Ne laissez-vous pas berner. Les Québécois le savent maintenant », et ce n'est pas un référendum qu'ils veulent, a-t-il affirmé.

Il se dit « tanné » du « nouveau clergé au pouvoir » qui s'emploie selon lui à définir « les bons et les mauvais québécois. » On peut à la fois « être fièrement identifié au Québec et croire également que la fédération canadienne est un bon levier pour le Québec », a-t-il souligné.

Philippe Couillard entend défendre « bec et ongles » le « caractère distinct du Québec » à l'intérieur du Canada. Ce caractère « fait partie de ce qui rend le Canada un pays si intéressant aux yeux du monde entier ».

La reconnaissance de ce caractère dans la constitution est pour lui « quelque chose d'incontournable et d'essentiel ». Mais contrairement à ce qu'il disait lors de la course à la direction du Parti libéral, il ne prendrait pas l'initiative de relancer des négociations en vue de signer la Constitution en 2017, à temps pour les 150 ans du Canada. « On va la faire (la négociation) pour la gagner. Je veux arrêter d'affaiblir le Québec », a-t-il justifié, laissant entendre comme son prédécesseur Jean Charest que le fruit n'est pas mûr.

Philippe Couillard modère donc ses ardeurs et prend un engagement qu'il avait fait avaliser par son parti l'automne dernier : « Le jour où ailleurs au Canada on voudra ouvrir une conversation constitutionnelle sur un enjeu comme le sénat ou les Premières Nations, je n'y participerai pas si à l'agenda on ne traite pas des demandes traditionnelles du Québec. C'est mon devoir historique, ce sera mon devoir historique comme premier ministre du Québec ». L'automne dernier, il précisait qu'Ottawa devrait d'abord satisfaire les conditions du Québec - son « repère incontournable » est l'accord du Lac Meech - avant de pouvoir rouvrir la Constitution concernant un autre enjeu. « Il n'y aura pas de changement constitutionnel qui recevra l'aval du Québec sous ma direction si on ne revient pas à cette question qui est essentielle », a-t-il affirmé.

Selon lui, si « certaines provinces n'ont pas entériné l'accord du Lac Meech, ça ne veut pas dire que le Canada l'a refusé ». Questionné sur le rejet par référendum de l'accord de Charlottetown, il a fait valoir que bien des jeunes n'étaient pas nés à l'époque de ces rondes constitutionnelles avant d'ajouter : « Quand je rencontre des Canadiens d'autres provinces, incluant des gens qui sont en politique, ils savent très bien que ça a été une porte manquée pour le Canada, qu'on aurait dû entériner l'accord du Lac Meech. Mais ce n'est pas pour cette raison qu'on rejette un pays ! C'est quoi cette affaire-là ? Est-ce que ça empêche les Québécois d'avoir une bonne qualité de vie, d'avoir ce qu'ils veulent comme citoyens enviés du monde entier parce qu'ils sont citoyens canadiens ? Non. »

« En quoi enlever la citoyenneté canadienne aux Québécois et aux Québécoises, car c'est ça dont il s'agit, améliorera-t-il leur qualité de vie ? Réponse : ça n'aide pas les Québécois, ça va nuire au Québec. C'est un retrait, une perte, ce n'est pas un gain. »