Même si le Québec est dans le rouge, Philippe Couillard s'engage à protéger les hausses de salaires des médecins de 540 millions de dollars pour la prochaine année, alors que le Parti québécois veut étaler ces augmentations.

Le chef libéral martèle dans ses discours que le Québec dépense trop par rapport à ses revenus. Le Québec constitue 23% de la population canadienne et, alors qu'il ne représente que 20% de la richesse collective, sa part des dépenses gouvernementales atteint 27%, plaide-t-il.

Mais selon Philippe Couillard, les dépenses en santé « ne représentent pas la source principale du problème » et correspondent à la moyenne canadienne. « Donc les dépenses en santé sont justifiées, et les ententes avec les médecins sont justifiées » à ses yeux.

Le salaire des médecins a augmenté de 500 millions $ cette année et bondira encore de 540 millions au cours de la prochaine en vertu des ententes qui arriveront à échéance en 2015. Leur rémunération a augmenté de 67 % en cinq ans. Il y aurait une autre augmentation de 150 millions au total pour 2015-2016 et 2016-2017.

Le gouvernement Marois a annoncé dans son dernier budget qu'il veut renégocier avec les médecins et étaler sur une plus longue période les augmentations prévues pour les deux prochaines années.

« Je ne reviens pas sur la signature de l'État. Moi, je respecte les institutions. L'État québécois a signé », a affirmé le neurochirurgien, entouré de ses deux candidats-médecins, les signataires de l'entente de rémunération convenue à la fin de 2009, l'ancien ministre Yves Bolduc et Gaétan Barrette, de la Fédération des médecins spécialistes du Québec. L'objectif de l'entente est de faire un rattrapage salarial par rapport aux médecins des autres provinces.

Philippe Couillard a fait valoir que les ententes prévoient des « récompenses à la productivité », ce qui permet d'augmenter l'accès aux services pour les patients. C'était le cas dans l'entente qu'il a lui-même négociée dans le passé, a-t-il dit.

Or, selon une étude menée par Damien Contandriopoulos, professeur à la Faculté des sciences infirmières de l'Université de Montréal, « les Québécois n'ont connu aucune amélioration de l'accessibilité aux soins de santé » entre 2007 et 2011, « malgré l'ampleur de l'investissement effectué dans la rémunération des médecins ». Le salaire des médecins spécialistes a augmenté de 25% en moyenne durant cette période ; celui des omnipraticiens, de 15%. Pendant ce temps, le nombre moyen de services rendus par chaque médecin spécialiste a diminué de 5% ; et de 7% pour chaque médecin de famille, indique l'étude

De 2012 à 2016, la facture de la rémunération des médecins aura passé de cinq à sept milliards de dollars par année.

S'il n'y a pas d'entente sur l'étalement de la hausse salariale des médecins, des compressions de plusieurs centaines de millions guettent le réseau de la santé, estime l'Association québécoise des établissements de santé et de services sociaux. Pour 2014-2015, la facture de 540 millions accapare plus de la moitié de l'augmentation budgétaire du ministère de la Santé, qui est limitée à 3% (976 millions), en vertu du budget Marceau.

Dans le cadre d'une prochaine entente avec les médecins, « je vous dis tout de suite que la négociation va se faire dans un cadre très précis en termes de moyens financiers disponibles et en termes du principe suivant : chaque nouveau dollar qui va être mis dans l'enveloppe de rémunération des médecins va être dans le but d'améliorer l'accessibilité, la continuité et la qualité des services aux Québécois », a affirmé Philippe Couillard.

Un gouvernement rendrait gratuits - donc couverts par l'assurance-maladie - les services de résonance magnétique, de scan et d'échographie. Ces examens peuvent coûter 150$ au privé. La mesure représenterait une facture de 50 millions en trois ans, selon Gaétan Barrette. Yves Bolduc travaille dans une clinique qui offre l'imagerie par résonance magnétique. Y a-t-il conflit d'intérêts ? a-t-on demandé à M. Couillard. « Non, celui qui va bénéficier (de la mesure), c'est le patient. (...) Et bien sûr, le médecin faut qu'il fasse son travail, il faut qu'il soit rémunéré pour son travail, il n'y a rien d'anormal là-dedans », a-t-il répondu.

Le chef libéral s'est engagé à ajouter dans le réseau de la santé 2000 « super-infirmières » sur une période de 10 ans et de créer 50 « super-cliniques », donc multidisciplinaires, ouvertes sept jours par semaine. Le coût n'a pas été précisé.

Philippe Couillard veut que les établissements, les agences, et le ministère de la Santé déposent un plan de réduction de la bureaucratie de 10 % en trois ans afin de dégager des économies de 150 millions. Il promet d'autres « gains d'efficacité », entre autres avec « l'usage optimal » des médicaments et la négociation de leurs prix.