La clé d'un gouvernement majoritaire du Parti québécois pourrait résider dans la douzaine de circonscriptions perdues de justesse par la formation de Pauline Marois il y a 18 mois à peine.

Une analyse des données effectuée par La Presse Canadienne révèle que le PQ a échappé 13 des 125 sièges à l'Assemblée nationale par moins de cinq points de pourcentage des voix exprimées lors des élections générales de septembre 2012. Pour remporter toutes ces circonscriptions, les troupes de Pauline Marois devront vaincre huit candidats libéraux et cinq caquistes.

Ces circonscriptions «serrées» sont surtout réparties en gros dans la vallée du Saint-Laurent: six d'entre elles étant concentrées en banlieue de Montréal, et une dans la métropole, les autres sont éparpillées: une en Outaouais, une autre près de Québec, deux dans le Sud-Est et deux autres en Mauricie.

Sur le plan démographique, 11 de ces circonscriptions possèdent un point en commun: elles sont majoritairement francophones - et même plus francophones que la moyenne québécoise, qui est de 84 %.

Les premiers jours de la campagne électorale ont souligné à quel point l'offensive péquiste se jouera sur un nombre très limité de cases de l'échiquier. Le PQ doit remporter neuf sièges de plus que les 54 dont il disposait à la dissolution pour offrir une majorité à Mme Marois, ce qui signifie qu'une petite augmentation de ses appuis dans certaines de ces régions «serrées» pourrait faire toute la différence.

De récents sondages ont laissé entendre que la popularité du PQ a atteint des sommets flirtant avec la majorité, alors que les adversaires libéraux et caquistes, qui détiennent actuellement ces sièges, perdraient du terrain.

Peu de temps après le déclenchement de la campagne, mercredi, l'autocar de Mme Marois s'est rendu en Mauricie, où les libéraux l'avaient emporté de justesse dans Maskinongé et Trois-Rivières en 2012.

Jeudi, la première ministre sortante a organisé un rassemblement dans la circonscription cruciale de Verdun, à Montréal, où le PQ a recruté la candidate-vedette Lorraine Pintal, directrice du Théâtre du Nouveau Monde.

Vendredi, enfin, la campagne péquiste s'est dirigée vers les banlieues de la couronne nord de Montréal, où Mme Marois a dévoilé l'identité d'une autre candidate-vedette, cette fois dans Groulx: l'ex-leader étudiante Martine Desjardins.

En 2012, le PQ a été battu par la Coalition avenir Québec dans la plupart des circonscriptions «volatiles» de la grande région montréalaise. Le Parti québécois a également fait le plein de candidats connus dans d'autres régions où la course sera serrée: l'ancien journaliste Alexis Deschênes dans Trois-Rivières, l'ex-député bloquiste Pierre Paquette, qui tentera de battre le chef caquiste François Legault dans L'Assomption.

Depuis la dernière campagne, le PQ a tenté de séduire les partisans de ses adversaires avec l'aide de son controversé projet de «charte des valeurs». Les sondages laissent entendre que cette charte, qui s'est attiré les foudres de l'opposition, est populaire chez les électeurs en régions.

Le PQ pourrait également profiter d'un avantage dans deux de ces 13 circonscriptions. D'une part, la circonscription libérale de Mégantic, théâtre de la catastrophe ferroviaire de l'été dernier, pourrait bien basculer dans le camp péquiste en raison de la gestion de la crise par la première ministre, un travail souligné par la population à la suite de la réaction rapide au désastre de Lac-Mégantic.

D'autre part, dans Saint-Jérôme, le candidat-vedette de la CAQ, Jacques Duchesneau, connu pour sa lutte contre la corruption, a refusé de reprendre du collier.

Avant qu'elle n'entre en campagne, Mme Marois a également tenté de faire pencher la balance en sa faveur dans plusieurs régions, dont en Mauricie. Son gouvernement a effectué pas moins de 85 annonces préélectorales au Coeur-du-Québec, totalisant plusieurs millions de dollars. Ses opposants l'ont tournée en ridicule pour avoir fait le tour de la région en hélicoptère pendant cette série d'annonces, poussant le député caquiste Christian Dubé a déclaré qu'elle jouait au père Noël.

Mais alors que le Parti québécois cible 13 circonscriptions, il devra également garder un oeil sur ses arrières. Les gains potentiels du parti pourraient être annulés par des défaites dans huit circonscriptions où le PQ a gagné par moins de cinq points de pourcentage en 2012. Il avait coiffé la CAQ au poteau dans sept de ces circonscriptions, et les libéraux dans l'autre.