François Legault a corrigé le tir après avoir affirmé à tort ce matin que moins de 14 de ses candidats avaient fait faillite. «Je faisais référence aux faillites d'entreprises (et non aux faillites personnelles)», s'est-il défendu cet après-midi peu avant de faire du porte-à-porte dans sa circonscription de L'Assomption.

Trois candidats de la Coalition avenir Québec ont déjà fait une faillite commerciale, et 11 autres une faillite personnelle. Leur chef était seulement au courant des faillites commerciales. La direction du parti connaissait quant à elle chacun des 14 cas, a-t-il expliqué.

À trois jours du vote, un tract anonyme circulait hier sur les réseaux sociaux pour indiquer que 14 candidats de la CAQ ont fait faillite. Il a été lancé par un faux compte Twitter au nom satirique de Pierre Poutine. Ce compte attaque la CAQ et le Parti libéral. Il renvoie d'ailleurs à un site internet antilibéral. Ce compte relaie aussi des incitations à voter stratégique pour le PQ.

Sur Twitter, M. Legault a laissé entendre que le PQ se cachait derrière cette attaque. «Après les faillites, que nous réserve le PQ comme salissage avant le vote?», a-t-il écrit.

Obtenir de telles informations n'est pas gratuit. Il faut payer 8$ pour chaque recherche sur le site du Bureau du surintendant des faillites du Canada.

L'explication du matin

François Legault avait confirmé ce matin en conférence de presse que certains de ses candidats avaient déjà fait une faillite personnelle ou commerciale. Il avait dit être au courant. «Mais je ne confirme pas qu'il y en a 14», avait-il alors précisé. Il y en aurait «beaucoup moins», avançait-il.

Il avait dit et maintient toujours que cette information n'est pas pertinente et ne devrait même pas être publique.

Dans le tract, parmi les 14 candidats identifiés, aucun n'est un candidat vedette. M. Legault n'avait pas voulu dire lesquels de ses candidats auraient été identifiés à tort. «On n'a pas à dire publiquement le nom de ces personnes, étant donné qu'elles ont été réhabilitées», avait-il expliqué.  Mais un autre document relayé par le même compte Twitter et qui porte le sceau du Bureau du surintendant des faillites a confirmé peu après qu'il y a effectivement 14 candidats caquistes qui ont fait faillite.

«Ce qui est important de dire, c'est que tous nos candidats ont été réhabilités, a insisté M. Legault. Ça a été réglé. Donc on ne devrait même pas le mentionner publiquement. C'est certain que lorsqu'on entreprend, on prend des risques. Donc je vis très bien avec ça.»

«Une personne n'est pas moins honorable si elle a eu une faillite, surtout si elle a été réhabilitée. Je vous rappelle que Pierre Péladeau a fait une faillite, et il est selon moi un homme admirable», a-t-il renchéri. Québecor a démenti cette information en soirée.

À la CAQ, on explique que l'ardoise de ces candidats a été nettoyée. Leur dossier de crédit ne contient plus de tâche. Certaines de ses faillites personnelles résultent de divorces.

Peu avant la formation de son parti politique, M. Legault disait avoir reçu 800 cv de candidats. Ces faillites remettent-elles en question la qualité de ces candidatures ? «Pas du tout, a-t-il assuré. Je vais vous donner un exemple. Stéphane Le Bouyonnec (La Prairie), un homme d'affaires réputé qui a fait de grands succès et qui a eu malheureusement, avec la Société générale de financement (SGF), une mésaventure dans Métaforia. Je ne pense pas que ça en fasse un moins bon candidat.»

«Est-ce que Mme Marois a quelque chose à dire contre Stéphane Le Bouyonnec?», a lancé M. Legault. Le mari de la chef péquiste présidait la SGF quand la société d'État a englouti 12 millions $ de fonds publics dans Métaforia.

Quatre ou cinq faillites au PQ, dit Marois

Pour la chef péquiste Pauline Marois, une faillite personnelle «ne devrait pas disqualifier» les candidats en cause. «Par contre, quand on se présente comme un bon gestionnaire comme M. Legault le fait, je pense qu'il pourrait se garder une petite gêne», a-t-elle pesté. Elle a indiqué que «quatre ou cinq» de ses candidats ont fait faillite. Elle n'a pas précisé s'il s'agissait de faillites personnelles ou commerciales.

Jean Charest a pour sa part invité François Legault à expliquer ce qu'il qualifie d'«apparente contradiction» au sein de la CAQ. Bien que les faillites fassent «partie de la vie», le chef libéral s'est étonné de trouver autant de candidats caquiste ayant vécu cette expérience.

« Ça dépend comment on se présente, a-t-il dit. Quand on se présente comme quelqu'un du milieu des affaires et qu'on va 'runner ça comme une business', c'est un peu le sens du propos que tenait M. Legault ce matin, forcément, les gens vont le mesurer à partir de ses propres critères. »

Selon le Bureau du surintendant des faillites, près de 35 778 Québécois ont déclaré une faillite personnelle en 2011. Durant la même année, 2127 entreprises ont aussi déclaré une faillite. Cela représente un taux d'environ 1% pour les entreprises.

Au moment d'écrire ces lignes, nous n'avions pas les chiffres pour le Parti libéral.

Beaucoup d'entrepreneurs à la CAQ

«Il n'y a pas beaucoup d'entrepreneurs au Parti québécois, alors il n'y a pas grand chance que ça leur arrive», a indiqué M. Legault.  

La CAQ compte aussi le plus grand nombre d'entrepreneurs parmi ses candidats, soit 49.

«Quand j'étais président d'Air Transat, j'ai embauché le commandant (Robert) Piché, qui avait eu un passé. Il avait été réhabilité et il fait partie des 10% ou 20% de pilotes qui auraient été capables de faire ce qu'il a fait. C'est un excellent pilote et il a sauvé des vies».

«On a besoin au Québec d'avoir des entrepreneurs qui prennent des risques, a-t-il poursuivi. Ça fait partie des changements qu'on veut faire. Il faut retrouver le goût du risque au Québec. Quand on prend des risques, parfois ça va bien, parfois ça va moins bien. Mais on ne peut pas continuer à ne pas prendre de risque», a-t-il avancé.

Il trouve que les Québécois «ont parfois peur de l'échec», et qu'il faudrait réapprendre à prendre des risques». «Si on ne prend pas de risque, on n'aura pas de rendement. (...) On ne peut pas avoir une moyenne de 1000», a-t-il imagé.

En plus d'entrepreneurs, il assure compter aussi des gestionnaires capables de prudence pour gérer les finances publiques. «Il faut avoir un équilibre, a-t-il expliqué. On a beaucoup d'entrepreneurs dans notre équipe, mais on a aussi des gestionnaires. Prenez Christian Dubé (candidat dans Lévis). Je vous ai déjà dit qu'il serait capable d'être notre ministre des Finances. Il a géré une grande entreprise qui s'appelle Cascades, comme vice-président Finances et comme responsables des activités en Europe d'une dizaine d'usines.»