Un peu plus du tiers, seulement, des jeunes de 18 à 24 ans ont exercé leur droit de vote, lors du dernier scrutin. L'Institut du nouveau monde s'en inquiète, au point de lancer l'idée de tenir un débat sur l'opportunité de rendre le vote obligatoire.

Lors du dernier scrutin provincial de décembre 2008, le taux de participation dans la population en général n'a atteint que 57 pour cent. Chez les électeurs de 18 à 24 ans, le taux de participation était famélique, soit 36 pour cent.

Le directeur général de l'Institut du nouveau monde, Michel Venne, ne va pas jusqu'à proposer de rendre le vote obligatoire; il propose cependant de provoquer le débat sur cette question afin de secouer et conscientiser les gens.

«Nous ne recommandons pas de rendre le vote obligatoire. Nous disons au Directeur général des élections: la situation est rendue tellement grave qu'il faudrait peut-être déclencher, donner un choc dans la population et lui dire «écoutez, si ça continue comme ça, il va falloir rendre le vote obligatoire»', résume M. Venne.

«L'expérience ailleurs indique que le taux de participation se rétablirait probablement assez rapidement, pour ne pas dire immédiatement, à son niveau antérieur. Nous savons qu'il y aurait des réticences dans la population, notamment chez les jeunes. Nous croyons que le taux d'abstention électorale a atteint, notamment chez les jeunes, un niveau assez dramatique pour au moins envisager sérieusement cette proposition et inviter la population à dire ce qu'elle penserait de rendre le vote obligatoire», a ajouté M. Venne.

Le vote obligatoire existe déjà en Belgique, par exemple, et au Brésil, a indiqué M. Venne.

L'institut a mené une recherche et formulé une série de propositions au Directeur général des élections, à sa demande, afin de favoriser la participation des jeunes au processus électoral. Il a dévoilé, mardi à Montréal, ses constatations et ses idées. Il a également validé ses suggestions auprès de 209 jeunes qu'il a sondés.

Autres idées

Un autre aspect innovateur de sa recherche est le fait de démontrer l'importance de ce qu'il appelle «le vote initial», c'est-à-dire le fait de voter dès qu'on acquiert le droit de vote. Si le jeune ne s'intéresse pas à la politique dès le départ, il semble qu'il se désintéressera de la politique pour de bon, rapporte l'institut.

«Un jeune qui ne vote pas la première fois risque de ne jamais voter de sa vie. Ça a deux conséquences graves: la première, c'est que les jeunes sont littéralement en train de s'exclure du processus électoral et ainsi de renoncer à influencer le choix du gouvernement. Dans une société vieillissante, c'est le suicide politique d'une génération. La deuxième conséquence grave, c'est qu'on se prépare un avenir démocratique déficient, dans lequel une proportion si élevée de la population s'abstenant de voter, c'est la légitimité même du gouvernement qui sera remise en cause. Nous courons un réel danger de ruiner notre démocratie», conclut M. Venne.

D'où l'importance de favoriser l'éducation à la citoyenneté des jeunes dès l'école secondaire, ainsi que leur engagement civique. L'institut fait d'ailleurs des recommandations formelles à ce sujet, puisqu'il est démontré que la participation citoyenne sous diverses formes - débats, engagement dans une association, par exemple - favorise ensuite la participation électorale.

L'institut a également lancé une campagne web, humoristique et qui fait réfléchir à la fois, pour inciter les jeunes à exercer leur droit de vote. Plusieurs personnalités ont participé à cette campagne «on est 2 millions, faut voter» (le nombre d'électeurs de 18-35 ans), parmi lesquelles Caroline Dhavernas, Joanie Rochette et André Sauvé.

L'INM poursuivra également sa mission d'éducation citoyenne en organisant une vingtaine de débats électoraux dans des cégeps et universités du Québec, afin d'intéresser les jeunes aux différents enjeux.

L'institut favorise également une réforme des institutions de façon à favoriser le vote des jeunes, notamment en aménageant des bureaux de scrutin dans les établissements postsecondaires et en intégrant des éléments de proportionnelle à notre mode de scrutin actuel, afin de donner plus de poids à chaque vote.

Évidemment, l'INM prône également le recours aux médias sociaux pour atteindre les jeunes. «La socialisation politique des jeunes d'aujourd'hui passe de plus en plus par les médias sociaux. À titre d'illustration, 74 pour cent des 18-35 ans consultent Internet au moins une fois par jour, et les sites Internet et de blogues viennent avant les bulletins de nouvelles télévisés et les journaux papiers au chapitre des sources d'information consultées en période électorale», a souligné Geneviève Baril, également de l'institut.