Pauline Marois ne veut pas accélérer les études environnementales sur le gisement Old Harry, comme l'a proposé François Legault ce matin. «Je pense qu'on doit prendre le temps de bien faire les choses», a réagi la chef du Parti québécois.

Le PQ est pris entre deux feux au sujet du gisement Old Harry. En 2008, Old Harry faisait saliver Mme Marois. Il serait «irresponsable» d'ignorer ce potentiel pétrolier, car il permettrait de payer pour l'éducation et la santé, affirmait-elle alors à son retour d'un voyage en Norvège. Dans sa plateforme, le PQ promet d'ailleurs de mieux tirer profit des hydrocarbures. Il propose un nouveau régime de redevances pour les hydrocarbures, qui permettrait de récupérer 50% du profit avant impôt.

Le gisement Old Harry est situé à 80 kilomètres des Îles-de-la-Madeleine dans le golfe du Saint-Laurent. Il est à cheval sur la frontière maritime entre Québec et Terre-Neuve. Il recèlerait jusqu'à deux milliards de barils de pétrole ou 5000 milliards mètres cubes de gaz naturel. L'année dernière, Québec estimait pouvoir récolter un total de 9 milliards $ de redevances. Ce calcul se fondait sur un baril de pétrole à 100$, sur un taux de récupération du gisement de 50% et sur le régime actuel de redevances, établi à 12,5%.

Il y a un moratoire dans le Saint-Laurent depuis 1998. Des études environnementales stratégiques (ÉES) ont été commandées. Celle sur le golfe du Saint-Laurent doit être déposée l'année prochaine.

Après avoir dit qu'il y avait «urgence» d'exploiter cette ressource, le gouvernement Charest avait finalement proposé l'année dernière de suivre cette étude par une autre plus locale, spécifiquement sur Old Harry.

Mme Marois attend l'ÉES avant de dire si le PQ souhaite exploiter le gisement. Et elle promet, comme les libéraux, de s'engager à consulter la population après le dépôt de l'ÉES avant de se décider. «Il y a beaucoup d'inquiétude des pêcheurs de homard et de crabe, parce que (Old Harry) est très près de ces réserves», a-t-elle reconnu.

Mme Marois commençait aujourd'hui sa campagne dans l'est du Québec. Elle n'avait pas d'annonce à faire. Ce matin, elle a rencontré un groupe de pêcheurs. L'industrie du tourisme et des pêches s'inquiète des risques environnementaux.

Un lobby de Madelinots pro-moratoire, Attention FragÎles, s'oppose également à l'exploitation du gisement. «Il y aura un débat (après l'ÉES), et on va entendre ces points de vue là», a-t-elle assuré.

Litige avec Terre-Neuve

Les fonds marins sont de compétence fédérale. L'année dernière, Québec a mis fin à un contentieux de 12 ans en obtenant du fédéral le droit d'exploiter et conserver les profits du gisement. Il lui reste à créer une société Canada-Québec destinée à cette exploitation. Terre-Neuve a une telle entente depuis 1985. Elle a déjà créé la société nécessaire, et la société Corridor Ressources a commencé les levées sismiques. Les environnementalistes ont critiqué les réglementations environnementales, laxistes selon eux, de cet office.

Comme Terre-Neuve a commencé l'exploration dans un gisement au large des côtes québécoises, le député péquiste Bernard Drainville a déjà affirmé que le moratoire était «bidon».

À ce problème s'ajoute celui de la frontière. Terre-Neuve ne reconnaît pas la frontière maritime de 1964, même si elle a été confirmée par deux tribunaux administratifs. Selon ce tracé, le deux tiers du gisement appartient au Québec.

Greenpeace a réagi ce midi en rappelant que la loi fédérale limite la responsabilité financière des entreprises pétrolières à 30 millions $ sur la côte est. S'il y a une marée noire, les contribuables pourraient hériter du reste de la facture, prévient le lobby environnementaliste.

La question est très sensible aux Îles. Au rassemblement du PQ, quelques citoyens brandissaient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire: «Pour un moratoire dans le Golfe»

Lutte serrée dans les Îles

Une lutte serrée est à prévoir dans les Îles-de-la-Madeleine. Le PQ la détenait de 1998 à 2008. Il l'a perdue par seulement 316 votes en 2008 aux mains du libéral Germain Chevarie. Jeannine Richard essaiera de défaire M. Chevarie. Elle est gestionnaire de la Verrerie La Méduse.

Le PQ a rappelé que, depuis la démission de la vice-première ministre Nathalie Normandeau, le responsable de la région n'y réside pas. C'est Yves Bolduc, député de Jean-Talon (Québec), qui est responsable de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine.