«Je suis profondément affectée, mais je dois aller de l'avant et assumer mes responsabilités», a déclaré Pauline Marois mercredi, au lendemain de l'attentat perpétré au rassemblement de son parti à Montréal. La nouvelle première ministre a rapidement annoncé ses couleurs. Même si son gouvernement est minoritaire, elle entend déposer une nouvelle loi 101 cet automne pour interdire aux francophones et aux allophones de fréquenter le cégep anglophone.

Autres priorités: elle veut annuler la hausse des droits de scolarité et abroger la loi 12 - connue auparavant comme le projet de loi 78.

Or, la réalisation de ces engagements dépendra en bonne partie de l'avis de l'opposition à l'Assemblée nationale, a-t-elle reconnu en conférence de presse.

Les électeurs lui ont confié mardi un mandat minoritaire en envoyant 54 députés péquistes à Québec. «Même en minorité, j'ai l'intention d'obtenir des résultats pour les gens», a dit Pauline Marois. «Nous avons un mandat d'une partie de la population, et nous [les élus] avons, pas seulement moi, la responsabilité de servir les Québécois. Je vais le faire avec les collègues de l'opposition.» Elle explique son échec à obtenir une majorité par une division du vote entre le Parti québécois et «d'autres formations» - une allusion à Québec solidaire et à Option nationale.

Un décret sera adopté par le PQ afin d'annuler la hausse des droits de scolarité. La loi 12 «n'aura plus lieu d'être», et «j'ai l'intention de proposer son abrogation», a ajouté Mme Marois. «Je suis convaincue que les partis d'opposition vont être d'accord.» Elle entend tenir un sommet sur l'enseignement supérieur, au cours duquel elle proposera une indexation de la facture des étudiants.

La nouvelle loi 101 qu'elle déposera comprendra les mêmes mesures que celles présentées en campagne électorale. Elle veut ainsi étendre l'application de la Charte de la langue française aux cégeps et aux entreprises de 11 à 49 employés. Elle se dit «sûre» de pouvoir «trouver un terrain d'entente» avec les partis d'opposition, qui sont pourtant réfractaires, sinon carrément contre ses intentions, selon le cas. «Je verrai jusqu'où sont prêts à aller les partis d'opposition pour collaborer à l'adoption de cette loi dans son entièreté ou dans un certain nombre de ses éléments, a-t-elle affirmé. Je veux au moins que tous les Québécois sachent jusqu'où je veux aller. Et je vais aller le plus loin que je peux avec l'appui de l'opposition.»

Pauline Marois a également l'intention de corriger les failles de la loi 35 pour empêcher des entreprises condamnées pour fraude d'obtenir des contrats publics. Elle entend aussi «accélérer le développement du réseau des garderies» à 7$. Elle veut abolir la taxe santé, «par décret ou dans un énoncé budgétaire». Quant aux redevances minières, elle affirme qu'il pourrait être difficile de les augmenter au niveau qu'elle souhaite.

La transition se fera «dans l'ordre et sans bouleversement», a-t-elle assuré. Le Conseil des ministres sera formé d'ici deux semaines.

Pauline Marois a eu un «premier contact cordial» avec son homologue fédéral Stephen Harper, mercredi. Sur le front des relations avec Ottawa, «nous pourrons fonder notre action sur les consensus déjà existants à l'Assemblée nationale du Québec», a-t-elle affirmé. Appelée à préciser ce que sont ces «consensus», Mme Marois a évoqué les dossiers du registre des armes à feu, des jeunes contrevenants et de la Commission des valeurs mobilières du Québec, qui ont tous fait l'objet de motions unanimes.

Il n'en demeure pas moins qu'elle aura du mal à mettre en oeuvre sa «gouvernance souverainiste». Cette stratégie vise à obtenir des pouvoirs d'Ottawa en attendant un référendum sur la souveraineté - il paraît aujourd'hui très éloigné, voire impossible à tenir au cours du présent mandat. En campagne électorale, Pauline Marois a dit vouloir rapatrier l'assurance-emploi, ainsi que les pleins pouvoirs en matière de langue, de culture et de communications.