L'adversaire de Marguerite Blais dans la circonscription de Saint-Henri-Saint-Anne s'interroge sur les sources de financement politique de la ministre des Aînés. La candidate du Parti québécois, Sophie Stanké, a constaté que près de 80% des dirigeants de résidences privées pour personnes âgées de Montréal de plus de 100 unités ont contribué à la caisse du PLQ de 2007 à 2012, notamment lors de cocktails.

La Presse a obtenu la recension effectuée par l'équipe de Mme Stanké. La recherche montre que les propriétaires et/ou personnes liées de 26 des 32 résidences privées pour personnes âgées de la métropole ont contribué au moins une fois à la caisse du PLQ depuis 2007, soit 81%. Durant la même période, 42 des dirigeants des 55 résidences de 100 unités et plus ont fait un don. Plusieurs résidences sont exclues du calcul puisque les propriétaires ne sont pas des citoyens du Québec et donc ne peuvent pas contribuer.

La recherche, qui a scruté la période de 2001 à 2012, indique que les dirigeants des résidences privées ont donné environ 300 000$ au PLQ, contre environ 30 000$ au PQ et un peu plus de 10 000$ à l'ADQ. Ces sommes comprennent aussi les dons fait par les propriétaires et personnes liées des résidences de 40 unités et plus.

Marguerite Blais est arrivée en poste en 2007, lors de la création du ministère des Aînés. Auparavant, son portefeuille tombait sous l'égide d'un autre ministère.

Même s'il n'y a rien d'illégal au fait de contribuer à une caisse électorale d'un parti, Mme Stanké se dit «estomaquée» par la forte proportion des dirigeants qui ont donné au PLQ.

«Ont-ils eu quelque chose en retour?», demande-t-elle. «Y-a-t-il eu un renvoi d'ascenseur?»

«Non», répond la ministre par la voix de son attachée de presse, Mee-Rang Ricard-Bouillon. «Comme tous les élus, elle fait des activités de financement et des gens de tous les milieux sont invités. Nous respectons la loi électorale», dit-elle.

Y a-t-il eu une stratégie de financement sectoriel? «Non», rétorque Mme Ricard-Bouillon.

Cocktails

Mathieu Duguay, président de la société Cogir, qui gère des centaines d'unités de logements pour aînés, reconnaît qu'il a fait des dons au PLQ ces dernières années durant des cocktails organisés par la ministre des Aînés. La ministre a organisé ce genre de cocktails chaque année, dit-il, et y a invité des collègues, comme le ministre de la Santé, Yves Bolduc, ou le ministre du Développement économique, Clément Gignac.

Habituellement, une cinquantaine de personnes assistait à ces cocktails, dont trois à cinq représentants des résidences pour personnes âgées, dit-il. Les participants étaient libres de donner ce qu'ils voulaient, ajoute-t-il.

En plus d'être propriétaire de résidences, M. Duguay est président du conseil d'administration du Regroupement québécois de résidences pour ainés (RQRA), qui représente 650 membres, propriétaires de 120 000 logements, soit 70% du parc locatif pour ainés.

«Le RQRA invite ses membres à être présents à ces cocktails avec les ministres étant donné que nous avons de gros enjeux avec l'État. Il faut être présent à ces rencontres pour faire part des préoccupations de l'industrie et faire avancer nos dossiers.»

Selon M. Duguay, malgré ces rencontres, l'industrie n'a pas été en mesure d'améliorer ses conditions d'affaires, au contraire. «L'industrie a eu zéro faveur», dit-il.

Les propriétaires ont été particulièrement touchées par l'adoption, en 2007, du Règlement sur les certificats de conformité de résidence pour aînés. Mathieu Duguay ne s'en plaint pas. «La certification, c'est bon. Les propriétaires qui veulent être dans l'industrie à long terme vont y rester. C'est un des outils pour assainir l'environnement des aînés en résidence», a-t-il dit.

Selon Mee-Rang Ricard-Bouillon, 20 personnes étaient présentes à une activité de financement en 2011 où étaient présents Mme Blais et M. Bolduc. De ce nombre, quatre étaient des propriétaires de résidences privées. Lors de l'activité où participait M. Gignac, quatre personnes sur 35 étaient liés aux résidences privées, précise-t-elle.

Eddy Savoie, l'homme à la tête des Résidences Soleil, qui hébergent 7000 personnes dans 13 résidences à travers le Québec, a aussi dit à La Presse avoir participé à des événements organisés par Mme Blais. C'est l'un des rares à avoir aussi substantiellement contribué à la caisse du PQ. Lui aussi assure qu'il n'a jamais rien obtenu en retour.

«On ne demande jamais rien pour nous autre. On parle toujours pour les aînés. Les seules choses qu'on peut faire penser aux ministres ou aux gens en politique, c'est qu'il y a beaucoup de gens âgés qui ont des grands besoins.»