La Coalition avenir Québec (CAQ) de François Legault poursuit sa montée dans les intentions de vote, avec une conséquence immédiate: le Parti québécois (PQ) de Pauline Marois a glissé très clairement en terrain minoritaire. Et si la CAQ poursuivait sur cette lancée jusqu'au 4 septembre, François Legault pourrait s'asseoir dans le siège de chef de l'opposition à l'Assemblée nationale.

C'est ce qui se dégage de la troisième enquête CROP de la campagne électorale, réalisée pour La Presse, par téléphone, auprès de 1002 personnes. Le coup de sonde, fait sur trois jours, du 24 au 26 août, présente une marge d'erreur de 3,1 points de pourcentage, 19 fois sur 20.

Après répartition des 18% d'indécis, le Parti québécois arrive toujours premier, avec 33% d'appuis, un point de moins qu'il y a 15 jours. Le Parti libéral du Québec (PLQ) perd aussi un point, à 26%, par rapport à l'enquête précédente - des mouvements statistiquement non significatifs. Mais depuis le début de la course, le PLQ accumule désormais un recul de trois points. Québec solidaire et le Parti vert restent exactement au même point, malgré les débats télévisés, avec respectivement 7% et 3% d'intentions de vote.

La CAQ fait le plein

C'est du côté de la CAQ qu'on observe le mouvement le plus important. Le nouveau parti de François Legault obtient en effet 28% des intentions de vote, une hausse de trois points depuis l'enquête précédente, qui s'est terminée le 14 août. C'est sept points de plus que son score de départ, qui était de 21%. Selon Youri Rivest, spécialiste de CROP, «on voit clairement une montée de la CAQ et une baisse des libéraux». Avec des appuis importants dans la région de Québec et auprès des jeunes familles du 450 pour la CAQ, «les contours des élections commencent à ressembler beaucoup à ce qui s'est passé en 2007».

Ce double mouvement a un impact sur le résultat prévisible des élections. La CAQ est maintenant à 30% chez les francophones, seulement six points derrière le Parti québécois (36%), ce qui laisse entrevoir des luttes serrées dans bien des circonscriptions. Conséquence des controverses de la semaine dernière quant au référendum d'initiative populaire et le droit des non-francophones de briguer les suffrages, le PQ glisse de trois points chez les francophones, par rapport à la précédente enquête de CROP, et la CAQ grimpe de quatre points. Les libéraux «se marginalisent» auprès des francophones: seulement 19% d'entre eux donnent leur appui au parti de Jean Charest, en baisse de deux points.

Selon Youri Rivest, si les élections avaient eu lieu cette semaine, le PQ aurait été porté au pouvoir. Mais avec seulement six points d'avance chez les francophones, le PQ est «très nettement» en zone minoritaire, selon le spécialiste. «Le PQ est sur le fil du rasoir, mais parvient à maintenir ses appuis. Legault est, lui, sur une lancée. Est-ce que cela va continuer ou s'essouffler, c'est toute la question», explique Youri Rivest.

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Méthodologie

Un sondage téléphonique probabiliste

La collecte de données téléphonique s'est déroulée du 24 au 26 août 2012. Un total de 1002 entrevues ont été réalisées.

Les résultats ont été pondérés afin de refléter la distribution de la population adulte du Québec selon le sexe, l'âge, la région de résidence ainsi que la langue maternelle.

La marge d'erreur maximale de ce sondage est de 3,1 points, 19 fois sur 20.

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La zone payante

Si cette lancée se poursuit pour la CAQ, le nouveau parti pourrait devenir l'opposition officielle, comme l'Action démocratique du Québec de Mario Dumont en 2007. Selon ces chiffres, les libéraux seraient troisièmes sur le plan du nombre de de sièges. Avec 30% des francophones, la CAQ «vient d'atteindre la zone payante: à ce niveau-là, on ramasse des sièges», observe M. Rivest. On se dirige donc vers une Assemblée nationale où les trois partis auront un nombre important de sièges.

CROP observe un bras de fer entre le PQ et la CAQ dans le 450, région située è l'extérieur de l'île de Montréal. Le PQ y récolte 37%, un point de plus qu'il y a 10 jours, mais la CAQ est sur ses talons, avec 35%. Il s'agit d'une montée spectaculaire de huit points en deux semaines, qui place les deux partis «statistiquement à égalité dans la couronne», observe Youri Rivest. L'étoile des libéraux pâlit encore et passe de 25% à 21% dans la couronne de Montréal.

Dans la région de Québec, la CAQ domine avec 35%, neuf points de plus qu'il y a deux semaines. Le PLQ et le PQ y sont au coude-à-coude avec respectivement 25 et 24% des intentions de vote. Pour le PLQ, il s'agit d'une chute rapide de sept points dans la capitale, alors que le PQ glisse de six points.

La CAQ ne parvient toujours pas à percer dans l'île de Montréal, avec seulement 18% des intentions de vote. «C'est le seul endroit où elle n'a pas décollé», explique M. Rivest. Dans la métropole, le PLQ est en avance avec 35%, contre 25% pour le PQ, qui arrive deuxième. À Montréal, le PQ doit aussi se battre avec Québec solidaire, qui obtient 12% des intentions de vote, un point de moins qu'il y a deux semaines.

Le vote se raffermit

Quand on jauge la fermeté de l'intention de vote, on observe que les électeurs de la CAQ sont beaucoup plus déterminés que lors du précédent sondage - 61% disent désormais que leur choix est fait, contre 44% il y a deux semaines. Le vote péquiste se raffermit également: 71% de ses partisans sont «décidés», neuf points de plus qu'au précédent sondage. Du côté libéral, on atteint désormais 82% d'électeurs décidés, un bond de 17%. Avec moins d'électeurs, le PLQ a désormais davantage d'inconditionnels, explique M. Rivest. Selon lui, il faut voir ce raffermissement du vote comme une conséquence des débats télévisés.

Ce sont surtout les partisans de la CAQ qui ont le plus regardé les débats télévisés. Libéraux et péquistes ont montré un intérêt similaire envers ces échanges.

Au fil des sondages, les enjeux ne changent guère du point de vue des électeurs. On est un peu moins sensible aux questions d'intégrité - 31% ont désormais cette priorité, six points de moins qu'il y a deux semaines. En revanche, la responsabilité augmente de cinq points, alors que la stabilité économique et le «changement» restent stables comme qualités recherchées pour le prochain gouvernement.