Si elle est élue, Pauline Marois veut interdire aux anglophones, aux autochtones et aux nouveaux arrivants de se présenter aux élections s'ils n'ont pas une «connaissance appropriée» du français.

En conférence de presse mardi, à Montréal, la chef péquiste Pauline Marois a précisé les contours de sa promesse visant à instaurer une citoyenneté québécoise. Le Parti québécois avait déposé en 2007 un projet de loi pour créer cette citoyenneté. Mais la chef a présenté des règles qui vont plus loin que celles prévues à l'époque.

Le projet de loi 195 prévoyait que tout citoyen canadien - et ses enfants - qui réside déjà au Québec et qu'il soit francophone, anglophone, allophone ou autochtone obtiendrait automatiquement cette citoyenneté. Il jouirait ainsi des droits que celle-ci confère, comme celui de se porter candidat aux élections.

Mais selon ce projet de loi, les nouveaux arrivants devraient respecter certaines conditions pour l'avoir. Ils devraient avoir une «connaissance appropriée» de la langue française. Cela impliquerait de leur faire passer des tests linguistiques.

Si un immigrant ne respecte pas ces conditions, il serait privé du statut de «citoyen québécois». Il lui serait ainsi interdit de financer un parti politique, d'adresser une pétition à l'Assemblée nationale et d'être candidat aux élections québécoises, municipales et scolaires, toujours selon le projet de loi. Notons que le PQ voulait obliger un immigrant à apprendre le français dans un délai de trois ans - l'État paierait ses cours.

«Oui on va représenter le projet de loi», a d'abord indiqué Pauline Marois. Puis elle a avancé de nouvelles règles: «Ce n'est pas pour les nouveaux Québécois, c'est pour tout le monde. Tous les citoyens du Québec qui veulent se faire élire dans une mairie, comme conseiller, comme député doivent avoir une connaissance du français». Ce critère s'appliquerait également à tous les membres de la communauté anglophone. «Dans le cas d'un anglophone, soit-il de souche, soit-il nouvellement arrivé, la langue commune ici, c'est le français. Y a-t-il quelqu'un qui puisse penser qu'on ne peut pas posséder cette langue?» a-t-elle lancé.

Et ce serait quoi une connaissance appropriée du français? Il faudrait connaître «les rudiments de la langue», être «capable de discuter avec des citoyens, d'expliquer son point de vue, même si parfois il y a un mot de travers». «Moi-même, parfois, mon anglais est déficient, vous le savez. Je crois que je réussis quand même à exprimer généralement assez bien ma pensée, alors on pourra peut-être s'inspirer de mon expérience», a-t-elle affirmé avec une pointe d'humour. Elle a ajouté que la loi canadienne prévoit déjà qu'un nouvel arrivant doit connaître l'une ou l'autre des langues officielles.

Pauline Marois a balayé une question lui demandant pourquoi elle n'avait pas précisé les critères avant. «Il y a plein de choses dont on n'a pas parlé et qu'on va faire mais qui vont être dans la continuité de ce qu'on a déjà annoncé comme perspective», a-t-elle répondu. En 2007, la Commission des droits de la personne et des constitutionnalistes avaient plaidé que le projet de loi péquiste serait discriminatoire et contraire aux chartes.

Pauline Marois faisait sa conférence de presse dans les locaux de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, qui représente les infirmières. Elle a rencontré sa présidente, Régine Laurent. Celle-ci a invité tous les chefs de parti à la rencontrer. Seuls Mme Marois et Amir Khadir, de Québec solidaire, ont accepté son invitation. La chef péquiste s'est engagée à donner une plus grande place aux «super-infirmières», ces infirmières praticiennes qui peuvent faire quelques actes normalement réservés aux médecins - demander des radiographies ou des tests de laboratoire, prescrire certains médicaments pour le traitement de plaies. Cette promesse fait partie d'un plan global en santé qu'elle a déjà annoncé et qui prévoit des investissements supplémentaires de 215 millions de dollars.

Sur l'heure du midi, elle a prononcé un discours devant plusieurs dizaines de militants réunis dans un restaurant de la rue Saint-Denis. Elle a accusé François Legault de proposer des politiques qui «risquent de créer une crise sociale, le chaos ». L'élection de la CAQ serait « une menace pour le Québec», a-t-elle ajouté plus tard.