Elle n'a pas baissé les bras. Elle est exténuée. Les organisateurs de la campagne Marois doivent ralentir. La fatigue a rattrapé la chef péquiste qui, depuis le début de la semaine et jusqu'au débat des chefs mardi ne prévoyait pas d'événements en soirée.

Mme Marois cessera ses activités samedi en début d'après-midi, pour préparer le débat de mardi soir. Du côté de Jean Charest, on prévoyait des activités, légères, jusqu'au dimanche midi. Idem pour Mario Dumont.L'état de santé de Pauline Marois est devenu source de préoccupation à la permanence péquiste, indiquent des sources fiables, à l'interne. Son dernier événement de soir remonte au 14 novembre, un discours devant des militants à Alma où, clairement, la chef péquiste était à plat, cherchait ses formules. Mardi prochain, au moment du débat, Mme Marois n'aura pas eu d'activité publique en soirée durant les 10 jours précédents, une stratégie étonnante en campagne électorale.

À 59 ans, Mme Marois est souvent claquée après avoir amorcé tôt ses journées. Surtout, son opération pour une appendicite début septembre n'a pas été aussi simple qu'on avait bien voulu le dire aux médias. Les médecins avaient d'abord cherché la source du problème un bon moment, avant de décider l'opération tard, un dimanche soir. Les médecins avaient craint d'être en présence d'une péritonite, a confié une amie.

Elle était restée cinq jours à l'hôpital, et avait tenu à être présente à un caucus de rentrée, une dizaine de jours plus tard.

Déjà, dans le document confidentiel publié par La Presse en début de campagne, les stratèges péquistes soulignaient que «la santé de notre chef» devait être prise en compte.

Hier, dans une entrevue à la radio, Mme Marois a minimisé les indices, nombreux, indiquant qu'elle n'était pas au sommet de sa forme.

«Je commence mes journées vers 5h, 5h30. Je fais de la marche sur tapis ou dehors. Une bonne marche rapide, ça m'énergise le matin. Rendu à 4h l'après-midi, je peux bâiller un peu... Non, je ne suis pas fatiguée. Je suis une femme très forte. J'ai généralement des agendas qui sont bien chargés, qui commencent tôt le matin. Ce n'est pas parce que les journalistes arrêtent à 4h l'après-midi que moi j'arrête», lance-t-elle.

En fait, explique Nicole Stafford, sa principale collaboratrice, Mme Marois fait souvent quelques entrevues aux médias après les points de presse de la journée. Mais pour les reporters en tournée, le dernier événement est rarement plus tard que 15h.

Lundi et mardi soir, des événements qu'on avait planifiés ont été mis de côté.

Mme Stafford a fait recenser les événements de la campagne Marois. Elle arrive à 100, deux fois plus, soutient-elle, que MM. Charest et Dumont. En fait, dans sa nomenclature, quatre entrevues avec des stations de radio locales sont comptabilisées comme autant d'événements.

Tournée éreintante

La campagne Marois a diminué le tempo surtout depuis une tournée éreintante en Abitibi et au Saguenay, indique-t-on. «En Abitibi et au Saguenay-Lac-Saint-Jean, on en a roulé un coup. Mais, oui, il y a eu certains après-midi où on a terminé plus tôt», a dit hier la chef péquiste. Après cette virée, les journalistes «étaient malheureux samedi, ils voulaient rentrer chez eux, ils trouvaient que je travaillais trop», a commenté Mme Marois avec ironie.

Combative hier matin, elle a attaqué le «mythe» de la bonne gestion économique du PLQ devant une salle pleine organisée par la Chambre de commerce de Québec. «Il fallait préparer cette allocution, c'est ce qu'on a fait mardi soir», a expliqué Mme Stafford, une explication convenue à l'avance, confie-t-on par ailleurs.

Par comparaison, la campagne d'André Boisclair était plus agressive, avec des événements réguliers en soirée. Bernard Landry, lui, avait adopté un rythme plus lent durant la seconde moitié de la campagne de 2003, ce qui lui avait valu des reportages ironiques.

Mais plusieurs voyants rouges sont allumés au tableau de bord des stratèges péquistes. Mme Marois a la voix qui flanche. Cela ne date pas d'hier, mais cela a été particulièrement flagrant depuis une semaine.

Surtout, elle multiplie les lapsus dans ses points de presse. À Québec au moment où elle devait commenter un embarrassant sondage CROP, elle a affirmé qu'il restait «trois jours de campagne» au lieu de trois semaines. Elle a confondu le réseau de santé «privé» et «public». On l'a vu cette semaine empêtrée pour expliquer son rôle dans les mises à la retraite anticipée sous le gouvernement Bouchard.

Elle a toujours eu du mal à jongler avec les chiffres - ses collaborateurs lui en donnent le moins possible. Mardi dernier, dans ses engagements en environnement, elle a oublié l'année de référence pour la réduction de 20% des gaz à effet de serre - 1990, selon le protocole de Kyoto. Même en début de campagne, Mme Marois a eu des trous de mémoire. Au moment même où elle dévoilait son plan économique, la chef péquiste a eu du mal à préciser le nombre de bénéficiaires du crédit d'impôt pour la TVQ qu'elle venait pourtant d'annoncer.

Il s'agissait d'un chèque de 200$, par ménage, un des engagements les plus percutants du PQ. «Il y en a 200 000», a d'abord répondu Mme Marois. Quand ses collaborateurs ont paru désapprouver elle s'est empressée de préciser: «Non, 1,2 million.» Puis, regardant du côté de son équipe à la recherche d'un peu d'aide, elle a finalement lancé: «2,1 millions!»