Pauline Marois n'a pas intérêt à prononcer trop souvent le mot «souveraineté» au cours des prochains jours. Un sondage CROP mené pour La Presse révèle que la question nationale figure en queue de peloton parmi les préoccupations des électeurs. Même s'ils sont d'allégeance péquiste.

À peine 16% des Québécois jugent que la souveraineté du Québec est un enjeu très important dont devrait s'occuper en priorité le prochain gouvernement. Bien sûr, ce taux grimpe chez les partisans de Pauline Marois, mais pas de façon spectaculaire: un péquiste sur trois (36%) fait de la question nationale un enjeu majeur dans ce coup de sonde réalisé du 6 au 13 novembre.

 

«C'est certainement historique pour les péquistes! s'exclame en entrevue Alain Giguère, président de la firme CROP. La souveraineté est en état de dormance et, sans l'ombre d'un doute, Pauline Marois doit éviter de la réveiller. Si elle part là-dessus, elle est foutue!»

Tous partis confondus, c'est de santé que les électeurs veulent entendre parler ces jours-ci. Près de 70% font de cet enjeu une priorité. L'éducation suit de près avec 61%. L'économie arrive troisième.

C'est pourtant l'économie qui fait les manchettes des journaux du monde entier depuis des semaines. Les électeurs sont bombardés de mauvaises nouvelles et l'on pourrait croire qu'ils n'ont que cela en tête. «La question est importante, mais les Québécois ne veulent pas d'un gouvernement qui s'occuperait d'une seule chose, observe M. Giguère. En cette période d'incertitude, ils veulent un bon gouvernement qui s'occupera autant de santé que d'éducation et d'économie.»

Jean Charest, qui a utilisé le marasme financier pour justifier le déclenchement du scrutin, aurait tout intérêt à diversifier son discours. «Il a fait le plein d'électeurs sur cette question», croit M. Giguère.

Les Québécois semblent avoir tourné la page sur les accommodements raisonnables, quelques mois à peine après le dépôt du rapport de la commission Bouchard-Taylor. L'intégration des immigrants et le taux d'immigration se classent maintenant aux 13e et 15e rangs des 15 principales préoccupations des répondants.

Autre surprise: les intérêts divergent de façon significative selon l'indicatif régional. Les électeurs de la région cosmopolite du 514 sont les plus préoccupés de toute la province par l'immigration. Dans le 450, les banlieusards s'inquiètent plus que les autres de leur avis d'impôt foncier et de leurs impôts. Enfin, les électeurs de la région de Québec semblent plus satisfaits que les autres Québécois du système de santé puisque cet enjeu arrive au deuxième rang de leurs préoccupations, après l'éducation.

Trois domaines d'intérêts

Pour la première fois, ce sondage permet aussi de classer en trois grands domaines les principaux intérêts des électeurs. Le pôle le plus populaire est celui de la «perspective sociale» de l'État, qui inclut la santé, l'éducation, l'économie, l'environnement, la pauvreté, le pouvoir d'achat des familles et l'avenir énergétique de la province. Les Québécois les plus sensibles à ces questions sont aussi les plus favorables au parti de Jean Charest.

Un deuxième groupe se caractérise par ses préoccupations pour l'identité nationale (enjeux: souveraineté du Québec, protection du français et défense des intérêts du Québec). Le Parti québécois y cartonne dans les intentions de vote, mais cet avantage a ses limites. Le groupe n'englobe que 31% des répondants, nuance M. Giguère.

Enfin, un troisième bloc se distingue par son attachement à des thèmes souvent associés à l'ADQ, comme la diminution de la taille du gouvernement, le taux d'imposition, la criminalité, la sécurité publique, la dette du Québec et la défense des intérêts des gens comme eux.

Ce sondage a été réalisé par téléphone entre le 6 et le 13 novembre 2008 auprès de 1003 répondants. La marge d'erreur, lorsque l'échantillon est complet, est de 3 points, 19 fois sur 20.

Thèmes auxquels les répondants ont accordé une très haute importance (une note de 9 ou 10 sur 10) comme enjeu dont devrait s'occuper le prochain gouvernement. Nombre de répondants: 1003 personnes.

 

Principales préoccupations des électeurs

1. La santé

2. L'éducation

3. L'économie

4. L'environnement

5. La protection du français

6. La pauvreté

7. La défense des intérêts des gens comme eux

8. La criminatité et la sécurité publique

9. L'avenir énergétique du Québec

10. La défense des intérêts du Québec

11. Le pouvoir d'achat des familles

12. Les taxes et les impôts

13. L'intégration des immigrants

14. La souveraineté du Québec

15. Le taux d'immigration

Principales préoccupations des électeurs en fonction de leur allégeance

Électeurs favorables au PLQ

1. La santé

2. L'économie

3. L'éducation

4 et 5 (ex aequo) La défense des intérêts des gens comme eux; l'environnement

Électeurs favorables au PQ

1. La santé

2. L'éducation

3. La protection du français

4. L'environnement

5. La défense des intérêts du Québec

Électeurs favorables à l'ADQ

1. La santé

2. L'éducation

3. L'environnement

4. La protection du français

5 et 6 (ex aequo) Diminuer la taille de l'État ; le pouvoir d'achat des familles

Principales préoccupations des électeurs selon les régions

Île de Montréal

1. La santé

2. L'économie

3. L'éducation

4. La protection du français

5. La pauvreté; la défense des intérêts des gens comme eux

Région de Québec

1. L'éducation

2. La santé

3. L'environnement

4. L'économie

5. La défense des intérêts du Québec

Reste du Québec

1. La santé

2. L'éducation

3. L'économie

4 et 5 (ex aequo) La pauvreté; la protection du français

6. La défense des intérêts du Québec

Méthodologie du sondage: Sondage effectué par téléphone auprès de 1003 personnes du 6 au 13 novembre 2008. Marge d'erreur: 3 points, 19 fois sur 20 lorsque l'échantillon est complet.