Quoi qu'en disent péquistes et adéquistes, le Québec n'a pas de déficit, même en tenant compte des hôpitaux, des commissions scolaires et des cégeps. Voici comment démêler les chiffres.

D'abord, ce n'est que depuis 2006 que le gouvernement doit présenter ses résultats en fonction des «principes comptables généralement reconnus» (PCGR). L'avantage de ces PCGR est de ramener la comptabilité à un langage universel, qui oblige le gouvernement à ne pas jouer avec les chiffres pour arriver à zéro. La réforme qui a suivi, en novembre 2007, contraint également le gouvernement à tout inclure, même le déficit des hôpitaux.

 

Hier, le gouvernement libéral a finalement rendu publics ses états financiers pour l'année terminée le 31 mars 2008. Résultat: le Québec n'est pas en déficit. Au contraire, il a même engrangé un énorme surplus de 1,65 milliard de dollars durant l'année. Une partie de l'argent a servi à enrichir le Fonds des générations (449 millions); il reste donc un surplus de 1,2 milliard.

Monique Jérôme-Forget n'a pas inventé ces chiffres, que le vérificateur général (VG), Renauld Lachance, a approuvés sans réserve. Même les états financiers de l'année précédente, qui affichaient un surplus de 1,3 milliard, sont conformes aux PCGR et approuvés sans réserve. Une telle approbation pour deux exercices consécutifs ne s'était pas vue depuis 32 ans.

Maintenant, Renaud Lachance a soutenu cette semaine que le déficit cumulé se chiffrait plutôt à 5,8 milliards. Qu'en est-il? Essentiellement, ce chiffre renvoie aux déficits annuels qui auraient dû être comptabilisés entre 2001 et 2007 si le gouvernement avait fait ses calculs en fonction des fameux PCGR. Cinq éléments avaient incorrectement embelli les résultats, dont deux en particulier.

Le premier est une dépense de 3,4 milliards qui a été passée directement à la dette du gouvernement en 2005 sans être d'abord inscrite dans le budget annuel. Cette dépense a été occasionnée par des transferts versés en trop par le fédéral et que le Québec doit rembourser.

Le deuxième élément concerne les résultats de la CSST. En 2003, Québec avait décidé de retirer la CSST de son périmètre comptable, ce qui avait amélioré ses résultats de 680 millions.

Pourquoi parler de ces 5,8 milliards aujourd'hui? C'est que, selon la Loi sur l'équilibre budgétaire de 2001, le gouvernement s'est engagé à résorber un tel déficit dans l'année ou les années suivantes. Le problème - et le VG l'a reconnu -, c'est qu'à l'époque, le gouvernement n'était pas assujetti aux PCGR.

Dans le cadre de la réforme de novembre 2007, donc, un comité de travail formé du VG et du ministère des Finances a proposé de ramener le compteur à zéro à partir du 1er avril 2006. De toute façon, les 5,8 milliards du passé ont déjà été ajoutés à la dette. Cette proposition a fait l'objet du projet de loi 85, mais cette loi n'a pas été votée avant le déclenchement des élections.

Cette semaine, le gouvernement a fait sa mise à jour budgétaire en fonction de ces recommandations. Et les réserves de 2,3 milliards tirées des restes des récents surplus serviront à ramener à zéro le déficit prévu des deux prochaines années, conformément au projet de loi 85, qu'il reste à adopter.