Le premier ministre Jean Charest doit sans délai former une commission d'enquête publique qui se penchera sur la collusion dans le monde de la construction et les contacts des entrepreneurs avec les élus municipaux, croit la chef de Vision Montréal, Louise Harel, qui assure, du même souffle, que les pratiques de financement occultes décrites par son ex-bras droit, Benoit Labonté, n'ont plus cours au sein de son propre parti.

Benoit Labonté a affirmé jeudi à Radio-Canada que le système de prête-noms était toujours bien vivant dans les partis municipaux, y compris à Vision Montréal. Hier, Louise Harel s'est clairement dissociée de ces propos. «Je le dis bien simplement: dès que je suis arrivée, j'ai immédiatement établi les règles du jeu en matière de financement: aucun don anonyme et tous les dons affichés sur le web. Des règles strictes et transparentes. Pendant 27 ans et demi, je n'ai jamais utilisé les systèmes décrits par M. Labonté. Je n'ai pas l'intention de les utiliser», a-t-elle déclaré lors d'un point de presse tenu devant l'hôtel de ville. Un journaliste a alors rapporté des extraits de l'entrevue de Benoit Labonté, qui n'ont pas été diffusés à Radio-Canada, dans lesquels l'ex-chef de Vision Montréal affirmait que le «financement sectoriel», le nom de code pour la sollicitation d'entreprises, était toujours utilisé par l'actuelle directrice du financement de Vision Montréal, Sylvie Bourassa, qui a été nommée par Louise Harel.

«La responsable du financement que Mme Harel a nommée en arrivant ne se cache pas pour dire en pleine réunion qu'elle va aller chercher du financement sectoriel. C'est les grandes entreprises et ce n'est pas permis. Et ensuite, les prête-noms», a déclaré M. Labonté.

Mme Harel a dit n'avoir pas pris connaissance de cette partie du témoignage de son ex-bras droit. «Je retiens du témoignage de Benoit Labonté qu'il considère que mon intégrité est sans tache. Si je suis venue pour faire le ménage, c'est que je savais qu'il y avait un ménage à faire, a-t-elle dit. Jamais je n'accepterai de telles méthodes.»

Pierre Lampron, son nouveau second, a lui aussi affirmé que «personne dans cette organisation n'est autorisé à amasser de l'argent en dehors de ces règles. Et notre moyen de vérification, c'est que tout est public sur le site». Et il ajoute que le financement d'une campagne est compliqué d'autant. Il n'a pas été possible de parler à Sylvie Bourassa hier.

Appel à Charest

Mais, hier, le message principal de Louise Harel était plutôt dirigé vers Québec. «Je fais un appel solennel, ce matin, au premier ministre Jean Charest, qu'il donne suite sans délai à ce très large consensus qui existe partout au Québec sur la nécessité de tenir une commission publique d'enquête, qui pourra nous indiquer les actions à faire pour démanteler le système de copinage et de collusion», a déclaré Mme Harel dans un point de presse tenu devant l'hôtel de ville. «Je dis aux citoyens qu'il ne doivent pas se résigner et que la façon de réagir est celle d'aller voter le 1er novembre. Qu'ils votent comme ils veulent, mais qu'ils démontrent qu'ils sont capables de reprendre le contrôle de leur hôtel de ville.»

«J'ai la ferme conviction que je pourrai démanteler ce système qui a cours à l'hôtel de ville», a-t-elle dit. Comment? Si elle est élue, Louise Harel demandera au Service de police de la Ville de Montréal d'examiner tous les contrats accordés dans les dernières années. Elle scindera aussi les contrats, afin de s'assurer que la concurrence joue, et elle reconstituera des services à la ville centre, comme l'urbanisme et le déneigement. «Nous devons reconstituer les services centraux, capables de nous mettre à l'abri d'une sous-traitance qui coûte extrêmement cher», a-t-elle dit.