L'avocat Stéphane Roof, candidat conservateur dans Saint-Maurice/Champlain, est intervenu à plus d'une occasion pour réclamer que ses clients pédophiles ne soient pas envoyés en prison, et qu'ils purgent plutôt leur peine dans la communauté, selon une recension effectuée par La Presse. Une position qui contredit celle de son parti.

Le Parti conservateur a fait de la lutte contre les pédophiles un de ses chevaux de bataille. «Le gouvernement (de Stephen) Harper a pris des mesures audacieuses pour que le Canada soit un endroit plus sécuritaire pour les familles, indique d'entrée de jeu sa plateforme électorale divulguée hier. Notre approche face au crime prévoit des pénalités plus sévères pour les crimes graves... et une meilleure protection contre les gangs, les contrevenants dangereux et les prédateurs sexuels.»

L'année dernière, le gouvernement conservateur a présenté le projet de loi C-9, proposant d'éliminer les peines dans la communauté pour les crimes graves, dont les crimes sexuels. M. Harper expliquait que c'est une des raisons pour lesquelles les conservateurs avaient été élus.

En mars dernier, c'est pourtant bel et bien une peine dans la communauté que Me Roof a réclamée pour son client, Côme Ricard, un pédophile qui n'en était pas à sa première condamnation. Ce n'était pas la première fois que l'avocat suivait cette ligne de conduite, mais il estime qu'il n'y a pas de contradiction.

«Ma pensée est toujours de faire en sorte que ce soit le mieux pour le client, a expliqué Me Roof, hier. Au niveau politique, c'est une autre chose: on veut protéger la collectivité. Là, vous mettez en opposition deux intérêts qui, dans certains cas, sont opposés. Ma pensée n'est pas dichotomique là-dessus.»

Pendant le plaidoyer sur la sentence, la victime de Côme Ricard a expliqué que ce dernier l'avait agressé sexuellement entre 50 et 100 fois quand il était enfant. Le procureur de la Couronne a réclamé six mois de prison. Le juge Jacques Trudel a allongé la peine à 10 mois. M. Trudel a souligné que Ricard avait déjà été condamné à six mois de prison pour un crime identique. L'accusé avait suivi une thérapie, mais n'en avait tiré aucune leçon, a ajouté le juge. Il s'est dit choqué d'apprendre que Ricard avait fait d'autres victimes et qu'il refusait de donner leurs noms.

De son côté, Me Roof a insisté sur le fait que son client avait été soumis à une thérapie. Il a mentionné qu'il ne fallait pas ajouter une sentence de prison chaque fois qu'une autre victime se manifestait. Selon lui, son client pouvait se faire aider par ses proches.

Me Roof avait suivi la même ligne l'année précédente, lorsqu'il avait défendu un agresseur de 63 ans, condamné pour des gestes sexuels qu'il avait fait subir à une petite fille de 11 ans, deux ans plus tôt. L'avocat a demandé que le juge n'envoie pas son client en prison, car ce dernier avait entrepris de suivre une thérapie. En 2002, il avait réclamé une sentence dans la collectivité pour un récidiviste qui avait déjà agressé sexuellement plusieurs femmes, dont une mineure.

«J'ai toujours travaillé en fonction de ce que le Code criminel permet, a dit hier Me Roof. Quand on a les intérêts des individus versus les intérêts de la collectivité, à chaque fois, vous aurez remarqué que des thérapies avaient toujours été suivies. Il y avait eu de longues périodes entre le moment où des gestes avaient été commis et le moment où des sentences étaient rendues, ce qui fait qu'on diminuait les risques de récidive.»