Les gens heureux n'ont pas d'histoire, selon l'adage.

C'est vrai aussi pour les partis politiques et leurs chefs: lorsque tout baigne pour un parti, son chef coule des jours paisibles sans les heurts et les psychodrames qui sont le lot quotidien des partis en crise.

Gilles Duceppe, dont ce sera la sixième campagne électorale comme chef, vit cet état de grâce depuis quelques années à la tête d'un Bloc québécois solidement ancré au Québec et installé depuis déjà 20 ans à Ottawa.

Depuis qu'il est devenu chef du Bloc, il y a 14 ans, Gilles Duceppe a imposé une stricte discipline à ses députés, ce qui lui permet de jouir de la loyauté sans faille de ses troupes.

Cette grande quiétude amène toutefois une question: et si c'était, comme on peut le penser, la dernière campagne de Gilles Duceppe, qui le remplacera? À ce jour, parmi ses députés ou dans la grande famille souverainiste, aucun aspirant du même calibre ne s'impose. Après Gilles Duceppe, le vide.

Mais revenons à la présente campagne. Quel plan pour Gilles Duceppe?

Le même que lors des deux derniers scrutins (et le même qu'à la Chambre des communes depuis 20 ans): défendre les intérêts du Québec.

De plus, Gilles Duceppe répétera aux Québécois qu'il faut voter Bloc pour empêcher Stephen Harper d'obtenir la majorité.

Même si le débat sur la pertinence du Bloc revient dans l'actualité avec la régularité d'un coucou suisse, Gilles Duceppe reste, et de loin, le chef de parti fédéral le plus apprécié et le plus respecté par les Québécois.

Il y a un risque, toutefois, associé à ce confort.

Le plus grand ennemi du Bloc, dans cette campagne, c'est l'excès de confiance. Même s'il jouit d'une luxueuse avance parmi les électeurs francophones, le Bloc devra se battre contre les libéraux dans environ une demi-douzaine de circonscriptions dans la grande région de Montréal et contre les conservateurs à Québec.

Il serait étonnant que les conservateurs commettent la même erreur qu'en 2008 et qu'ils attaquent de front la légitimité du Bloc, mais Stephen Harper a toutefois un avantage majeur sur Gilles Duceppe: il peut orchestrer d'importantes annonces pendant la campagne et vanter les réalisations de son gouvernement.

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Age > 63 ans

État civil > Marié, deux enfants

Études > Baccalauréat en sciences politiques, Université de Montréal

Expérience politique > Militant communiste dans sa jeunesse. Adhère au Parti québécois en 1970. Élu député du Bloc québécois en 1990, il devient chef de cette formation en 1997.

Circonscription > Laurier-Sainte-Marie

Avantage pour > Le Bloc a de l'argent, sa machine est rodée; son chef est expérimenté et connaît très bien le terrain. De plus, le chef du Bloc, contrairement aux trois autres, ne fait campagne qu'au Québec, et encore, il se concentre sur environ 60 circonscriptions.

Avantage contre > Le Bloc se renouvelle peu et il ne pourra jamais former le gouvernement ni même, parole de Gilles Duceppe, prendre officiellement part à un gouvernement de coalition.

Principal défi > Garder le rythme pendant 35 jours pour maintenir un intérêt autour d'une campagne qui s'annonce pépère, et garder ou reprendre les circonscriptions chaudes à Montréal et à Québec.